Le français Alstom décroche un contrat géant de 1,5 milliard d’euros mais sur fond de polémique en Pologne

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Alstom décroche un contrat géant en Pologne.

Un vent de modernité souffle sur les rails polonais, avec bout de cette bourrasque ferroviaire, un drapeau tricolore. Le constructeur Alstom vient de remporter l’un des plus gros appels d’offres de son histoire récente en Europe de l’Est : 42 trains à deux niveaux pour PKP Intercity, le transporteur public polonais, 1,5 milliard d’euros à la clé, entretien compris. Un projet colossal, ambitieux et symbolique à plus d’un titre mais qui provoque aussi quelques remous nationalistes en Pologne.

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Le contrat décroché par Alstom représente environ 1,5 milliard d’euros, : 910 millions pour les trains eux-mêmes et 620 millions pour leur entretien pendant 30 ans.

La compétition fut acharné avec Stadler, le fabricant suisse, également bien implanté en Europe centrale mais l’argument du portefeuille a semble-t-il fait mouche chez PKP Intercity puisque l’offre du Suisse était plus chère de 89 millions d’euros. D’autres critères ont été retenus comme une offre globalement moins convaincante en matière de consommation d’énergie et de rapidité de livraison.

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Des mastodontes pour fluidifier le trafic

Le train porposé par Alstom est un Coradia Max. Il s’agit d’une automotrice électrique dont une partie des voitures est aménagée à deux niveaux. À ce jour, le constructeur en a écoulé plus de 500 exemplaires, déployés surtout en Allemagne (dans plusieurs Länder), mais aussi au Luxembourg et en Espagne. L’un des modèles les plus récents a été dévoilé l’an passé lors du salon InnoTrans de Berlin.

Deux étages, une silhouette massive et moderne, une capacité de plus de 500 passagers par rame. Ces trains sont conçus pour les lignes les plus fréquentées du pays, comme Varsovie–Gdańsk, Cracovie, Wrocław ou Białystok. Leur vitesse de pointe ? 200 km/h. On est loin des vieux Intercity poussifs d’autrefois.

À l’intérieur, le confort est au rendez-vous : Wi-Fi, clim, prises, ports USB, écrans d’information, distributeurs automatiques. Le tout pensé pour une expérience fluide, qu’on soit en déplacement professionnel ou en virée familiale. Le train est pensé comme un lieu de vie, et pas juste un couloir entre deux gares.

Techniquement, les trains comportent tout ce qui est jugé comme “allant de soi” en 2025 : vidéosurveillance embarquée, GPS, systèmes de diagnostic automatique, compatibilité avec l’ETCS niveau 1 et 2, et une homologation qui permet de circuler aussi en République tchèque. Ces rames sont prêtes pour l’Europe du rail.

Le grand pari industriel d’Alstom sur la Pologne

Ce contrat ne sort pas de nulle part. Alstom a massivement investi en Pologne, en particulier sur son site de Chorzów, en Silésie. 2 500 personnes y travaillent déjà, et les chaînes de production tournent à plein régime pour servir d’autres clients : Allemagne, Irlande, Roumanie…

L’entreprise française mise gros : 115 millions d’euros d’investissements étalés sur cinq ans pour agrandir ses ateliers, moderniser ses équipements, et structurer une véritable base industrielle compétitive à l’échelle européenne. Chorzów n’est plus une usine régionale, c’est en train de devenir un hub ferroviaire stratégique.

Cette montée en puissance à l’Est coïncide avec une réduction des capacités de production en France et en Allemagne. Les coûts, les délais, la flexibilité : tout pousse les industriels à se réorganiser. Alstom l’a compris, et ce contrat polonais vient valider ce choix.

Une Pologne qui accélère… et qui anticipe la concurrence

Derrière cette commande, il y a une réalité plus large : la libéralisation du rail polonais. Le pays prépare l’arrivée de nouveaux opérateurs. Des lignes à grande vitesse sont en construction. Et PKP Intercity, jusqu’ici en situation quasi-monopolistique, doit se réinventer pour survivre.

D’ici 2032, avec l’ouverture du Centralny Port Komunikacyjny (CPK), la Pologne aura ses vraies premières lignes à très grande vitesse, avec des trains roulant à 300 km/h. Ce sera un tournant.

Alors en commandant ces 42 rames modernes, PKP ne se contente pas d’améliorer son offre actuelle. L’entreprise prépare l’avenir, tente de fidéliser ses passagers, et surtout se donne les moyens de ne pas se faire distancer quand les concurrents privés arriveront. Une sorte de bouclier roulant, en acier et en LED.

Deux tentatives ratées, une troisième couronnée de succès

Ce projet a mis du temps à se concrétiser. Deux appels d’offres précédents ont échoué, en 2021 et 2023. Les propositions dépassaient largement le budget prévu, parfois de plus de 2 milliards de zlotys (environ 460 millions d’euros). Il a fallu revoir les exigences, affiner les attentes, et relancer la machine.

Cette fois, ça a fonctionné. L’appel d’offres a attiré deux candidats sérieux, les prix sont restés maîtrisés, et la qualité technique était au rendez-vous. Un rare exemple de grand contrat public qui parvient à éviter les polémiques.

Et ce n’est peut-être que le début. Une option pour 30 trains supplémentaires est incluse, ce qui porterait la flotte à 72 rames si elle est activée. De quoi faire grimper la facture totale au-delà des 2,5 milliards d’euros.

Tout le monde ne saute pas de joie à Varsovie

Derrière les sourires officiels et les chiffres alignés au millimètre, le contrat avec Alstom ne fait pas que des heureux en Pologne. Plusieurs voix se sont élevées dans la presse nationale, notamment du côté du très suivi Wyborcza.pl, pour dénoncer le choix d’un groupe étranger au détriment d’un champion local. Même si les trains seront bien produits en grande partie à Chorzów, sur le sol polonais, certains estiment que le cœur industriel de la commande aurait dû battre à Bydgoszcz ou à Nowy Sącz, chez les constructeurs nationaux comme Pesa ou Newag.

Le reproche est autant symbolique qu’économique. Certains élus dénoncent le fait qu’Alstom Polska ne soit pas une entreprise de capitaux polonais, malgré sa présence locale. D’autres agitent le chiffon rouge de la “repolonisation” de l’industrie stratégique, un thème très prisé dans le débat public depuis quelques années. Des figures comme le député Marcin Horała ou la députée Paulina Matysiak ont même demandé la suspension du contrat, au nom d’un patriotisme industriel malmené.

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Un contrat photographie du nouvel équilibre industriel européen

Ce contrat est une véritable photographie du nouvel équilibre industriel européen. Une entreprise française qui fabrique en Pologne pour répondre à la demande locale, tout en construisant un réseau plus fort et plus dense sur le continent. Une Pologne qui passe de l’héritage post-soviétique à une mobilité du XXIe siècle, plus rapide, plus confortable, plus connectée.

Et en filigrane, une bataille pour la souveraineté industrielle, la compétitivité européenne, et l’adaptation à un monde où le rail redevient une priorité énergétique, climatique et stratégique.

Récapitulatif du contrat d’Alstom avec PKP :

Donnée clé Valeur
Montant total du contrat 1,5 milliard d’euros
Nombre de trains 42 rames (option pour 30 de plus)
Capacité par rame Plus de 500 passagers
Vitesse maximale 200 km/h
Maintenance prévue 30 ans
Économie par rapport à l’offre concurrente 89 millions d’euros
Investissement d’Alstom en Pologne 115 millions d’euros
Date de mise en service prévue Dans 3 ans et demi
Site de production principal Chorzów (Silésie)

Sources :

  • https://businessinsider.com.pl/biznes/alstom-z-najkorzystniejsza-oferta-w-wielkim-przetargu-dla-pkp-intercity/jkbq9ew
  • https://www.rynek-kolejowy.pl/wiadomosci/alstom-coradie-max-dla-pkp-intercity-wyprodukujemy-w-polsce-124611.html

Image : Coradia Max d’Alstom

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Guillaume AIGRON
Guillaume AIGRON
Très curieux et tourné vers l'économie, la science et les nouvelles technologies, (particulièrement ce qui touche à l'énergie et les entreprises françaises) je vous propose de de découvrir les dernières actualités autour de cette passion

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