La production mondiale de plastique a dépassé les 400 millions de tonnes par an depuis 2022, avec une quantité significative aboutissant dans les océans. Ces plastiques se dégradent en microplastiques (MP), des particules polymères solides de moins de 5 mm, qui, en raison de leur densité, tendent à s’accumuler dans les sédiments marins plutôt que dans la colonne d’eau. Cette accumulation expose les organismes benthiques à de fortes charges de microplastiques, potentiellement nuisibles.
Méthodologie
L’étude a été menée sur la plage de Cupe à Ipojuca, Pernambuco, Brésil. Des échantillons de méiofaune ont été collectés et placés dans des microcosmes avec différentes concentrations de polystyrène (PS) marqué de fluorescence pour suivre l’ingestion. Les concentrations testées étaient de 10³, 10⁵ et 10⁷ particules/mL, analysées sur une période de neuf jours. La méiofaune a été évaluée tous les trois jours pour déterminer l’abondance, la diversité taxonomique et la composition communautaire.
Résultats
L’ingestion de MP a été observée chez presque toutes les taxons de méiofaune, à l’exception des tardigrades. La dose ingérée était fortement dépendante de la concentration, avec l’absorption la plus élevée à 10⁷ particules/mL. Les densités totales de méiofaune et la richesse en espèces étaient significativement plus basses à la concentration la plus faible de MP, tandis que la diversité de Shannon-Wiener et l’uniformité étaient plus élevées dans les traitements à faible concentration de MP. Curieusement, à la concentration la plus élevée, la structure de la communauté de méiofaune n’était pas significativement affectée, suggérant que les effets des MP sur la méiofaune sont au mieux subtils, bien que les concentrations plus faibles aient causé des baisses substantielles en abondance et diversité.
Focus sur les tardigrades et leur interaction avec les microplastiques
Les tardigrades, souvent appelés “oursons d’eau”, sont des micro-organismes notables pour leur extrême résilience face à divers stress environnementaux, allant du vide spatial à des températures extrêmes. Cependant, cette étude révèle une interaction particulière et moins connue entre les tardigrades et les microplastiques. Surprenamment, aucun tardigrade n’a ingéré de microplastiques dans les conditions expérimentales, quelle que soit la concentration testée. Ce comportement s’explique probablement par la structure spécifique de leur appareil buccal, composé d’un tube oral et d’un stylet, utilisés pour percer et aspirer les contenus des cellules végétales ou animales, plutôt que pour ingérer des particules solides.
Pourtant, une proportion significative de tardigrades a montré des particules adhérant à l’extérieur de leur corps. En particulier, à la concentration la plus élevée de microplastiques, 54% des individus présentaient des particules sur leur exosquelette, principalement autour des appendices locomoteurs. Cela pourrait avoir des implications pour leur mobilité et, par extension, pour leur capacité à se nourrir et à se reproduire, bien que ces impacts n’aient pas été directement mesurés dans l’étude.
Ces découvertes soulignent un aspect crucial de l’écotoxicologie des microplastiques : même des organismes qui ne les ingèrent pas directement peuvent être affectés par leur présence dans l’environnement. Les particules externes peuvent altérer physiquement les organismes en perturbant leurs fonctions normales ou en modifiant leur interaction avec leur habitat. Ainsi, même les espèces résistantes comme les tardigrades ne sont pas totalement immunisées contre les défis posés par la pollution par les microplastiques. Ces résultats enrichissent notre compréhension des effets subtils mais potentiellement significatifs des microplastiques sur des organismes clés dans les écosystèmes aquatiques.
Discussion
Les résultats indiquent que les MP affectent différemment la méiofaune en fonction de la concentration. À faible concentration, une diminution notable de l’abondance et de la diversité a été enregistrée, ce qui pourrait indiquer un mécanisme de réponse contre-intuitive où des concentrations plus faibles sont plus nuisibles. Ces résultats contrastent avec des études précédentes où des impacts plus marqués étaient observés à des concentrations plus élevées.
Cette étude met en évidence la complexité des réponses des communautés de méiofaune aux microplastiques et souligne la nécessité de poursuivre les recherches pour mieux comprendre ces effets. Les concentrations environnementalement pertinentes de MP ont provoqué une diminution de la densité et de la diversité de la méiofaune, tandis qu’une concentration beaucoup plus élevée n’a pas différé d’un contrôle sans ajout de MP. Cela pourrait suggérer que les particules de MP servent de stimulus alimentaire à haute concentration, atténuant les effets négatifs à court terme sur la méiofaune.
Source de l’article : https://peerj.com/articles/17641/