Des pyramides dans le désert chinois : l’UNESCO redécouvre les Xixia.
Xixia… Un mot presque oublié qui vient de refaire surface ce 11 juillet 2025. Les tombeaux impériaux de cette dynastie de plus de 1000 ans viennent en effet d’être inscrits au Patrimoine mondial de l’UNESCO.
Il s’agit de l’un des sites funéraires les plus vastes, les plus mystérieux et les plus intacts de toute la Chine médiévale. Un désert habité par des fantômes de rois, des fresques effacées par le vent, et des pyramides de terre crue qui tiennent encore debout mille ans après.
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Quarante kilomètres carrés de silence et de poussière au cœur de la Chine classés patrimoine mondial de l’UNESCO
Le site, situé à quelques kilomètres de Yinchuan, s’étire sur près de 40 kilomètres carrés, au pied oriental des monts Helan. Ici, le paysage entier est un monument. Il compte neuf mausolées impériaux, plus de 270 tombes secondaires, des canaux anciens, des digues contre les crues, et même des vestiges de temples bouddhistes.

On y marche sur une terre ocre. Parfois, le sol sonne creux. Par moments, on aperçoit la base d’une pyramide trapue. On croit deviner une chambre funéraire, effondrée il y a des siècles. Les archéologues y trouvent encore des fragments de céramique, des éclats de fresques, des inscriptions en tangoute, cette langue aujourd’hui indéchiffrable sauf pour quelques spécialistes passionnés.
C’est un site qui ne se donne pas au premier regard. Il faut l’écouter, l’imaginer, marcher en silence, comme dans une bibliothèque dont chaque pierre serait un livre mal rangé.
Une architecture qui parle plusieurs langues
Ce qui frappe, dans ces tombeaux, c’est qu’on ne comprend pas tout de suite ce qu’on regarde. Ils ressemblent à des pyramides d’Amérique centrale, ou à des tumulus d’Asie centrale, ou encore à des temples bouddhistes. Ils sont tout ça à la fois. Et autre chose encore.
Les Xixia, peuple tangoute d’origine tibéto-birmane, ont fondé leur royaume en 1038. Ils ont emprunté aux Tang et aux Song, leurs puissants voisins. Ils ont digéré des influences du Tibet, de l’Asie centrale, de la route de la soie. Résultat : des tombeaux à mi-chemin entre le monastère, la forteresse et le sanctuaire cosmique.
Pas de marbre. Pas de granit. Les empereurs Xixia reposent dans des structures en terre crue, savamment compactée. Une technique simple, mais redoutablement efficace dans un climat sec. Un millénaire plus tard, leurs tombes sont toujours là.

Une dynastie que Gengis Khan a voulu effacer
Les Xixia ont régné pendant près de deux siècles sur un territoire immense, entre désert de Gobi, steppes mongoles et bassins chinois. Leur capitale, Xingqing (aujourd’hui Yinchuan), était un centre intellectuel et militaire. Ils avaient leur propre langue, leur propre administration, leur propre armée.
Et puis Gengis Khan est arrivé. En 1227, après une guerre de dix ans, il a rayé la dynastie de la carte. Littéralement.
La capitale a été détruite, les archives brûlées, les élites massacrées et les Xixia ont été effacés des livres d’histoire pendant des siècles.
Ce qu’il en reste aujourd’hui ? Des tombes et du sable ainsi que le sentiment étrange de visiter une civilisation fantôme, revenue de loin pour rappeler qu’elle a existé et qu’elle mérite d’être entendue.
Une reconnaissance tardive, mais méritée
L’UNESCO n’a pas seulement classé un tas de ruines. Elle a reconnu l’un des rares témoignages tangibles d’une culture effacée, aux antipodes des clichés chinois habituels. Les tombeaux Xixia racontent un monde métissé, religieux, à cheval entre le bouddhisme et le chamanisme, entre l’Empire du Milieu et les confins.
L’inscription a été défendue par Pékin avec méthode. Des archéologues, des historiens, des spécialistes du patrimoine numérique ont travaillé pendant des années à documenter le site, à modéliser ses structures, à protéger ce qui peut l’être sans figer ce qui vit encore.
Aujourd’hui, des sentiers balisés permettent de découvrir les mausolées sans les piétiner, et un musée ouvert en 2023 propose aux visiteurs une plongée dans l’univers tangoute à travers des artefacts, des reconstitutions et des films documentaires.
Un désert qui respire encore
Dans ce désert du Ningxia, la lumière est crue et les ombres sont longues. Les tombeaux Xixia ne brillent pas. Ils absorbent. Ils aspirent le regard. Ils forcent au respect. Et ils posent une question simple : que reste-t-il d’un empire, une fois les tambours de guerre tus et les bibliothèques détruites ?
Il reste des tombes. Il reste des traces. Il reste un peuple qui n’a pas dit son dernier mot, même mille ans après sa disparition.
Source : UNESCO
Image de mise en avant : Vue aérienne du mausolée n° 6 (du sud-est au nord-ouest)
Copyright pour toutes les photos de l’article : © Administrative Office of Xixia Tomb Area of Yinchuan City