Des scientifiques chinois découvrent d’étranges formes de vie à 9 450 mètres de profondeur avec un exploit réalisé seulement 4 fois en 65 ans

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À 9 450 mètres sous l’océan, la vie s’invente sans lumière.

Pas de soleil, pas d’oxygène, des températures proches du zéro absolu, et une pression équivalente à 1 000 fois celle que subit votre corps en surface. C’est dans ce royaume extrême que des chercheurs chinois viennent de réitérer un exploit seulement réalisé 3 fois auparavant dans l’histoire de l’humanité : descendre sous la barre des 9000 mètres avec une nacelle habitée !

Ils ont profité de l’occasion pour  découvrir des formes de vie étranges, accrochées à des sources de méthane, quelque part entre les fosses des Kouriles et des Aléoutiennes. Une plongée dans l’inconnu… à couper le souffle.

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On les appelle les zones hadales. Ce sont les profondeurs les plus extrêmes des océans, entre 6 000 et 11 000 mètres. À cette altitude inversée, la lumière n’a jamais pénétré, les poissons y ont des visages de fantômes, et les fonds marins ressemblent à des cicatrices tectoniques. Pourtant, là où tout semblait stérile, la vie explose !

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Un sous-marin habité, un trou noir océanique

C’est grâce au sous-marin chinois Fendouzhe (qui signifie “combattant” en mandarin) que cette mission hors-norme a été rendue possible. L’équipe a plongé à plus de 9 450 mètres de profondeur, dans des zones qui n’avaient encore jamais été visitées par l’humain.

Et soudain… la surprise : des champs de vers tubicoles, des banquettes de palourdes géantes, des tapis de bactéries blanches comme de la glace. Des formes de vie qui se développent sans lumière du tout, sans photosynthèse. Leur secret ? La chimiosynthèse, un processus qui transforme des composés chimiques, comme le méthane ou le sulfure d’hydrogène, en énergie.

Le souvenir du professeur Piccard

Difficile de ne pas penser ici à Jacques Piccard, le pionnier suisse qui, en 1960, fut le premier à atteindre la fosse des Mariannes, le point le plus profond connu sur Terre (10 916 mètres), à bord du bathyscaphe Trieste, aux côtés du lieutenant américain Don Walsh.

Ce jour-là, en observant un poisson plat nager dans la vase à près de 11 000 mètres, Piccard brisait une croyance profondément ancrée chez les biologistes marins : aucune forme de vie complexe ne pouvait survivre dans un tel enfer de pression et d’obscurité. Il faudra des décennies pour confirmer ses observations et comprendre que la vie, justement, trouve toujours un chemin.

On n’oubliera pas non plus l’exploit du célèbre réalisateur James Cameron (Titanic entre autres) qui a plongé en 2012 en solo à 10 908 mètres dans le Challenger Deep, restant plusieurs heures au fond, filmant et collectant des échantillons.

Les Chinois avaient eux-mêmes déjà franchi le seuil symbolique des 9 000 mètres en 2020, en descendant à 10 909 mètres (déjà à bord du Fendouzhe). Sauf qu’aujourd’hui, leur découverte ne concerne pas une créature isolée, mais des écosystèmes entiers structurés autour d’une énergie venue des entrailles de la Terre.

Une planète dans la planète

Ces espèces vivent autour de sources de méthane qui suintent du fond marin. Le méthane, produit par la décomposition microbienne de matière organique enfouie, sert littéralement de carburant à un écosystème entier.

En étudiant la chimie de l’eau et les signatures isotopiques du méthane, les chercheurs ont confirmé que des microbes, enfouis depuis des milliers d’années, transforment cette matière en gaz, lequel s’échappe ensuite à travers les failles. À l’arrivée : un festin pour les palourdes géantes, vers géants et bactéries filamenteuses.

Une mécanique de survie à haute pression

Le Dr Xiaotong Peng, co-responsable de l’expédition, insiste : ce qu’ils ont vu dépasse tout ce qu’ils espéraient. Ces créatures ne sont pas seulement adaptées à la pression, elles en tirent même parti pour stabiliser leurs structures biochimiques. C’est le monde à l’envers. Plus c’est profond, plus c’est stable.

Dr Megran Du, de l’Institut chinois des sciences marines, veut maintenant comprendre comment ces espèces parviennent à survivre à des pressions de 1 000 bars. Ces mécanismes pourraient avoir des applications insoupçonnées, en médecine par exemple, ou pour créer des matériaux résistants.

Il a fallu exactement 0,0000000005 seconde pour que cette découverte change la science à jamais

Une découverte aux résonances planétaires

Cette expédition s’inscrit dans le programme mondial d’exploration hadale (GHEP). Objectif : cartographier les profondeurs océaniques les plus extrêmes. À mesure que les submersibles s’enfoncent plus loin, ce que l’on croyait rare devient… courant. Il se pourrait que la majorité de la biosphère terrestre vive sous pression, dans le noir, depuis des millions d’années.

La découverte chinoise n’est pas une fin en soi. Elle réactive le rêve de Piccard, celui de découvrir un monde inconnu, plus proche de nous que Mars ou Vénus, mais encore si mal compris.

Résumé des 4 explorations habitées sous les 9 000 mètres de profondeur de l’Histoire

Submersible Profondeur atteinte Année Pays Équipage Zone explorée
Trieste 10 916 m 1960 Suisse / USA Jacques Piccard, Don Walsh Challenger Deep (fosse des Mariannes)
Deepsea Challenger 10 908 m 2012 USA James Cameron Challenger Deep (fosse des Mariannes)
Fendouzhe 10 909 m 2020 Chine 3 personnes Challenger Deep (fosse des Mariannes)
Fendouzhe 9 450 m 2025 Chine Équipe IDSSE Fosses Kouriles-Kamtchatka / Aléoutiennes

 

Source :

Peng, X., Du, M., Gebruk, A. et al. Flourishing chemosynthetic life at the greatest depths of hadal trenches (en français : “Une vie chimiosynthétique florissante dans les plus grandes profondeurs des fosses hadales”).

Nature (2025). https://doi.org/10.1038/s41586-025-09317-z

Image : Le submersible chinois Fendouzhe utilisé dans l’étude. /IDSSE.

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Guillaume AIGRON
Guillaume AIGRON
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