Il vole à 9 521 mètres, sans carburant : l’exploit solaire d’un pilote suisse.
Un avion léger, une paire de lunettes d’altitude et une ambition stratosphérique. C’est tout ce qu’il a fallu à Raphaël Domjan pour battre un record vieux de 15 ans, en montant plus haut qu’aucun autre pilote n’avait osé… à bord d’un avion alimenté uniquement par le soleil !
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Une ascension à couper le souffle, sans une molécule de CO₂ pour Raphaël Domjan
Ce 13 août 2025, quelque part entre le Valais suisse et les nuages, un planeur électrique a grimpé jusqu’à 9 521 mètres. Au bout du manche : Raphaël Domjan, un “aventurier écolo” comme il se décrit lui-même. Son avion s’appelle SolarStratos. Il n’a ni réacteur, ni kérosène. Seulement une hélice et des cellules photovoltaïques bien exposées.
Pour vous donner une idée, il a volé à la même altitude qu’un Airbus A320, croisant brièvement un avion de ligne en plein ciel. Deux mondes se sont frôlés. L’un vrombissait au kérosène, l’autre glissait dans le silence, bercé par les photons.
Un avion qui brille… littéralement
Le SolarStratos ressemble à un mix entre une libellule et un vaisseau futuriste. Long de 9,6 mètres, avec une envergure de 24,8 mètres, il a l’air d’un oiseau géant, léger comme une plume, mais armé jusqu’aux ailes de technologie.
Sa peau est couverte de 22 m² de panneaux solaires, répartis sur les ailes. En plein vol, ils captent l’énergie nécessaire pour alimenter un moteur électrique placé à l’avant. Résultat : l’avion décolle à 50 km/h, peut grimper jusqu’à 140 km/h, et navigue à 80 km/h en croisière. On est loin des pointes de vitesse d’un Rafale, mais très au-dessus du niveau technologique d’un ULM.
Monter, recharger, recommencer
Voler haut avec un moteur solaire, ce n’est pas juste une question de puissance. C’est un art de la stratégie. Domjan s’est appuyé sur les ascendances thermiques, ces colonnes d’air chaud invisibles qui montent du sol. À chaque montée, il économise ses batteries. À chaque palier, il les recharge grâce au soleil.
Avant le vol record, il a d’ailleurs tenté plusieurs essais. L’un d’eux a dû être avorté faute de courants ascendants. Patience et météo, voilà les deux moteurs invisibles de l’aventure.
Et pour corser le tout, l’avion doit atterrir avec au moins 16 % de batterie, preuve que l’énergie solaire a suffi du début à la fin. Pas de triche possible. Chaque joule compte.
Un rêve d’enfant qui vise la stratosphère
Domjan ne compte pas s’arrêter là. Son rêve ? Grimper jusqu’à 12 000 mètres, là où commence officiellement la stratosphère. Pas seulement pour battre un record. Pour prouver que l’on peut voler haut, loin, et proprement.
L’homme n’en est pas à son coup d’essai. En 2010, il avait déjà réalisé un tour du monde sur un bateau solaire, parti de Miami. Ce nouveau défi est une suite logique : après avoir dompté les vagues, il veut tutoyer les étoiles.
Entre laboratoire volant et vitrine technologique
Soyons clairs : le SolarStratos ne transportera pas de passagers vers Barcelone ou Tokyo de sitôt. Il vole lentement, ne supporte pas la pluie, et dépend du soleil. Bref, il est encore loin de l’aviation commerciale mais ce n’est pas le but. Ce genre de projet sert à tester, à inspirer, à ouvrir des voies. Un peu comme les premières voitures électriques il y a 20 ans. Elles faisaient sourire, aujourd’hui elles font la loi sur les routes.
Domjan et son équipe jouent le même rôle que les pionniers de l’aviation en 1903. Pas pour faire du volume. Pour montrer que c’est possible. Et en matière d’imaginaire collectif, c’est souvent ce genre de gestes qui font bouger les lignes.
Les chiffres de l’exploit
Élément | Donnée |
Altitude atteinte | 9 521 mètres (31 237 pieds) |
Précédent record | 9 235 mètres (établi en 2010) |
Longueur de l’avion | 9,6 mètres |
Envergure | 24,8 mètres |
Surface de panneaux solaires | 22 m² |
Vitesse de croisière | 80 km/h |
Vitesse maximale | 140 km/h |
Temps de vol record | 5 heures et 9 minutes |
Pourcentage de batterie restant | ≥ 16 % à l’atterrissage |
Objectif à venir | Voler à 12 000 mètres, dans la stratosphère |
On le savait déjà : l’aviation est l’un des secteurs les plus difficiles à décarboner. Ce vol ne règle rien. Il dessine juste un horizon. Et parfois, c’est tout ce qu’il faut pour que des milliers d’ingénieurs se remettent à rêver… en planchant sur les solutions de demain.
Source : https://www.solarstratos.com/en/challenge