Des chercheurs japonais découvrent un nouvel état physique du liquide le plus précieux sur Terre : l’eau

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De l’eau gelée qui bouge comme un liquide ? Des chercheurs japonais observent un nouvel état de la matière.

Et si l’eau, ce liquide qu’on pense connaître par cœur, nous réservait encore des tours de passe-passe quantiques ? Une équipe japonaise vient d’observer un nouvel état de l’eau à mi-chemin entre la glace et le liquide, où les molécules restent figées… tout en tournant comme des toupies. Un grand écart moléculaire qui redéfinit la frontière entre solide et fluide !

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Quand l’eau se glisse dans des espaces invisibles

À l’échelle macroscopique, l’eau se comporte assez bien. Elle gèle, fond, bout, ruisselle… et remplit nos théières sans faire d’histoires. Sauf que dans les interstices du vivant, à l’intérieur des membranes cellulaires ou des canaux de matériaux nanométriques, elle change complètement de comportement.

On entre alors dans un monde où l’eau ne suit plus les règles. Elle interagit autrement. Elle ralentit, s’oriente, se structure et parfois, elle s’installe dans un état hybride, ni vraiment glace, ni tout à fait liquide.

C’est ce qu’on appelle l’état de pré-fusion (premelting state dans la langue de Shakespeare). Un état théorisé depuis des années, observé indirectement, mais jamais mesuré avec précision… Jusqu’à maintenant.

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Une goutte d’eau confinée dans un cristal hexagonal

L’équipe du professeur Makoto Tadokoro, à l’université des sciences de Tokyo, a imaginé une expérience millimétrée en fabriquant des cristaux liquides en forme de tiges hexagonales, percés de canaux de 1,6 nanomètre de diamètre. De quoi y faire passer de l’eau… au compte-gouttes moléculaire.

Dans ces nano-canaux, les chercheurs ont injecté de l’eau lourde (D₂O), plus facile à détecter que l’H₂O classique, puis ont utilisé la résonance magnétique nucléaire (RMN) pour observer ce qui s’y passait à température ambiante.

Et là, surprise. L’eau se fige, certes, mais elle ne se comporte pas comme la glace de votre congélateur. En fait, elle forme trois couches distinctes, chacune avec un comportement propre.

Trois couches, trois rythmes

Voici ce qu’ont révélé les spectres RMN :

  • La couche centrale est la plus stable, organisée, proche de la glace classique.
  • Les couches intermédiaires montrent un réseau de liaisons hydrogène plus lâche, plus chaotique.
  • La couche de surface, enfin, est celle où l’on observe le plus de mouvement.

Et c’est justement dans cette dernière que l’équipe a mis en évidence le fameux état de pré-fusion. Les molécules sont positionnées comme dans un solide, mais elles tournent sur elles-mêmes à une vitesse proche de celle d’un liquide.

En termes simples, c’est comme si vous assistiez à un bal de statues tournantes : immobiles sur place, mais en rotation permanente.

L’eau, championne des paradoxes thermiques

Comment est-ce possible ? Grâce à une propriété très particulière des liaisons hydrogène. Ces liaisons, qui lient temporairement les molécules d’eau entre elles, sont suffisamment fortes pour figer la position, mais pas assez pour bloquer la rotation.

Dans cet état intermédiaire, le réseau de glace commence à se désorganiser avant même que la glace ne fonde complètement. On assiste à une sorte de transition douce, progressive, qui échappe à la distinction classique entre état solide et liquide.

Cette phase pourrait exister dans les canaux ioniques des cellules, dans les pores des minéraux, ou dans les dispositifs nanofluidiques de demain.

Vers de nouveaux matériaux à base d’eau

Ce comportement ouvre des perspectives inattendues. En créant des réseaux de glace partiellement mobiles, on pourrait imaginer stocker des gaz comme l’hydrogène ou le méthane de façon plus stable, plus dense, et surtout plus sûre.

C’est aussi une piste pour développer des hydrates artificiels, ces matériaux à base d’eau capables d’encapsuler des molécules énergétiques. Une technologie précieuse pour l’industrie du froid, du stockage ou du transport d’énergie.

Si l’on comprend mieux comment l’eau passe progressivement de l’état solide à l’état liquide, on pourrait aussi contrôler finement ces transitions, avec des applications allant du biomimétisme aux nanoréacteurs.

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L’eau n’a pas fini de nous surprendre

Cette étude japonaise, publiée dans Journal of the American Chemical Society, rappelle une vérité simple : l’eau est tout sauf banale. Même à température ambiante, même dans des conditions apparemment simples, elle invente des états intermédiaires qui déjouent nos catégories.

L’état de pré-fusion n’est peut-être qu’un aperçu. Il pourrait exister d’autres phases exotiques dans des conditions encore plus extrêmes, qu’on découvrira dans les années à venir.

Source :

Solid-State 2H NMR Analysis for Hierarchical Water Clusters Confined to Quasi-One-Dimensional Molecular Nanoporous Crystals (en français « Analyse RMN 2H à l’état solide de clusters d’eau hiérarchiques confinés dans des cristaux moléculaires nanoporeux quasi unidimensionnels »)
J. Am. Chem. Soc. 2025, 147, 36, 32440–32446
https://doi.org/10.1021/jacs.5c04573
Publié le 27/08/2025 dans Journal of the American Chemical Society

Image : éclaboussure d’eau comme la couronne (Freepik)

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Guillaume AIGRON
Guillaume AIGRON
Très curieux et tourné vers l'économie, la science et les nouvelles technologies, (particulièrement ce qui touche à l'énergie et les entreprises françaises) je vous propose de de découvrir les dernières actualités autour de cette passion

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