Un disque volant solaire pour explorer la haute atmosphère terrestre
Entre les avions et les satellites, il existe une une zone encore mal connue et dont vous n’avez probablement jamais entendu parler : la mésosphère.
Située entre 50 et 100 kilomètres d’altitude, elle échappe aux ballons classiques comme aux satellites en orbite. Pourtant, cette couche de l’atmosphère joue un rôle clé dans la dynamique climatique, les aurores boréales, et l’entrée des météorites.
Une équipe de l’Université Harvard a peut-être trouvé le moyen d’y accéder : un minuscule disque volant, sans moteur ni pile, poussé uniquement par la lumière du soleil grâce à la photophorèse.
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Photophorèse, le phénomène qui permettrait de faire voler des sondes dans la mésosphère
La photophorèse, c’est un phénomène physique rare. Lorsqu’un objet est éclairé, la face chaude repousse davantage les molécules d’air que la face froide. Cela génère une force de poussée capable de faire léviter un objet ultra-léger dans un gaz raréfié.
Ce principe, décrit pour la première fois en 1873, n’avait jamais permis de faire voler des structures de taille significative… Jusqu’à aujourd’hui.
Les ingénieurs de Harvard, avec des chercheurs de l’Université de Chicago, ont réussi à fabriquer un disque de 1 centimètre de diamètre en céramique d’alumine, recouvert d’une fine couche de chrome. Cette combinaison permet de capter la lumière et de produire la poussée nécessaire.
Une lévitation démontrée en laboratoire
Pour simuler les conditions de la mésosphère, les chercheurs ont construit une chambre à basse pression, reproduisant une altitude de 60 kilomètres avec une pression d’environ 26,7 Pascals.
Lorsqu’ils ont exposé leur disque à une lumière équivalente à 55 % de l’intensité solaire, celui-ci s’est soulevé et a flotté, validant les calculs théoriques.
Ce succès marque la première fois qu’un dispositif photophorétique de taille centimétrique est capable de léviter de manière stable.
Tableau des caractéristiques du dispositif :
Caractéristique | Valeur mesurée |
Diamètre du disque | 1 cm |
Matériaux | Alumine + couche de chrome |
Méthode de propulsion | Photophorèse (éclairage solaire) |
Pression testée | 26,7 Pa |
Source lumineuse | LED/laser équivalant à 55 % soleil |
Milieu simulé | Chambre basse pression (60 km) |
Applications dans le climat, la communication… ou Mars
Ce petit disque volant pourrait embarquer des capteurs pour mesurer la température, la pression ou les vents dans la mésosphère, jusqu’ici inaccessible. Une série de ces disques pourrait aussi former une antenne flottante, utile en cas de catastrophe pour établir des communications d’urgence.
À long terme, les chercheurs envisagent même une utilisation sur Mars, où la faible pression atmosphérique est idéale pour la photophorèse. De futurs essaims de disques pourraient explorer la haute atmosphère de la planète rouge sans moteur, ni pile, ni carburant.
Une technologie durable et autonome
Contrairement aux drones ou aux ballons sonde, cette technologie n’a pas besoin de batterie, ni de panneau solaire, ni de combustible. Elle repose uniquement sur la lumière ambiante et sur des matériaux passifs, ce qui en fait un mode de vol intrinsèquement durable.
Les chercheurs travaillent désormais à intégrer des modules de communication pour que chaque disque puisse transmettre ses données en temps réel. Ils espèrent aussi optimiser le design pour augmenter la portance, et pourquoi pas, multiplier les formats pour d’autres altitudes ou d’autres atmosphères.
Source : Schafer, B.C., Kim, Jh., Sharipov, F. et al. Photophoretic flight of perforated structures in near-space conditions. Nature 644, 362–369 (2025). https://doi.org/10.1038/s41586-025-09281-8
Image : Représentation graphique d’un nouvel aéronef fonctionnant par photophorèse. Crédit : Schafer et al. (2025)