88 kilomètres dans les airs : le taxi électrique qui veut changer nos villes.
Le pilote serre les sangles. L’engin vrombit doucement, comme un vélo électrique sous stéroïdes.
À Salinas, une bourgade californienne coincée entre des champs d’artichauts et des entrepôts, un drôle d’oiseau s’apprête à décoller.
Il s’appelle Midnight et il vole à l’électricité. Ce 18 août 2025, il va écrire une page d’histoire.
À son bord, un humain. En dessous, l’asphalte d’un monde qui change.
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Ce n’est pas un drone, ce n’est pas un avion : Bienvenue dans l’ère des eVTOL !
À première vue, Midnight ressemble à un croisement entre un hélicoptère et un insecte. Douze rotors, un cockpit minimaliste, des lignes futuristes, et pas une goutte de kérosène.
C’est un eVTOL, un “appareil électrique à décollage et atterrissage vertical”. Une invention qui, sur le papier, promet des trajets aériens urbains pour le prix d’un Uber.
Ce jour-là, l’appareil va décoller, rouler quelques mètres sur piste, s’élancer et rester en l’air 31 minutes. Distance parcourue : 88 kilomètres. Le tout, avec un pilote bien réel aux commandes, casque vissé sur la tête, regard fixé sur l’horizon.
Un vol record qui promet une commercialisation prochaine
Archer Aviation, la start-up à l’origine de ce prototype, ne fait pas ce vol pour le plaisir. Il s’agit de leur premier test longue distance avec pilote à bord. Jusqu’ici, l’engin avait surtout volé en mode stationnaire ou vertical, comme un drone.
Mais ce vol-ci, en mode “décollage conventionnel”, sert à tester les limites : endurance de la batterie, stabilité en croisière, réaction aux vents… À son pic de vitesse, Midnight a atteint 202 km/h, un peu plus rapide qu’un TER.
Le but est de montrer que le rêve du taxi volant urbain n’est plus si loin. Et surtout que les promesses marketing peuvent devenir des kilomètres concrets, des minutes gagnées, du bruit en moins.
En ligne de mire : les JO de Los Angeles
Si Archer met les bouchées doubles, ce n’est pas seulement pour les beaux yeux de l’innovation verte. L’entreprise a été sélectionnée pour transporter les visiteurs des Jeux olympiques de Los Angeles en 2028.
Imaginez des navettes aériennes entre les différents sites olympiques, ou de l’aéroport à votre hôtel. Plus rapide que le métro, moins bruyant qu’un hélicoptère et alimenté par de l’électricité.
On commence à voir à quoi pourrait ressembler un futur sans embouteillages ni gaz d’échappement au-dessus des villes.
Des pilotes d’essai et des rêves qui volent
Derrière ce vol, il y a quatre pilotes qui testent tous les jours la bête volante dans le ciel californien. Ils notent tout : l’autonomie réelle, les vibrations, les sons, les sensations.
Le fondateur et PDG d’Archer, Adam Goldstein a évoqué l’importance du vol du 18 aout. « J’étais fier d’être sur le tarmac avec l’équipe pour ce vol. Franchir la barre des 50 miles (88 km) à pleine vitesse est une nouvelle étape claire vers la commercialisation, qui montre la maturité de notre programme. »
Une course mondiale portée par la congestion urbaine
Le vol d’Archer s’inscrit dans une course technologique mondiale qui s’accélère. Le marché des eVTOL, estimé à plus de 20 milliards d’euros d’ici 2030, est alimenté par une demande croissante pour des solutions de mobilité aérienne urbaine silencieuses, électriques et sans émissions. Aux côtés d’Archer, on trouve des géants comme Joby Aviation, soutenu par Toyota, ou encore Volocopter, pionnier allemand déjà partenaire des Jeux olympiques de Paris 2024. En France, la start-up Ascendance Flight Technologies, basée à Toulouse, développe son propre appareil hybride, l’Atea, avec une autonomie de 400 kilomètres et un décollage à faible empreinte sonore. Autre acteur tricolore, Blue Spirit Aero mise sur une propulsion à hydrogène pour réduire encore l’empreinte carbone. La bataille se joue sur l’autonomie, la certification et l’acceptabilité sociale.
La France, avec son savoir-faire aéronautique historique, entend bien ne pas rester au sol.
Objectif : Dubaï avant New York ?
Pendant que les ingénieurs peaufinent chaque vis, Archer prépare déjà l’étape suivante : le Moyen-Orient.
Les premiers vols commerciaux devraient démarrer aux Émirats arabes unis, où les autorités veulent faire de leurs villes un laboratoire de mobilité futuriste.
Là-bas, pas besoin d’attendre 10 ans de réglementation. Les “vertiports” sont déjà en construction, les permis plus souples, et l’image d’innovation très vendeuse.
Et pendant ce temps, en Occident, les certifications de la FAA (l’autorité américaine de l’aviation) avancent doucement. Trop doucement ? L’avenir le dira.
Source : Archer Aviation