La Chine vient d’inventer le moteur XXL de la transition énergétique avec une turbine de 500 mégawatts.
Imaginez une roue de manège… mais de 6 mètres de diamètre, en acier brillant, équipée de 21 cuillères géantes, qu’on appelle ici des “augets”. L’eau dévale la montagne, frappe cette roue à pleine vitesse, et hop, de l’électricité en cascade. Voilà ce que la Chine de proposer la Chine au monde avec cette turbine destinée à sa future centrale au Tibet.
C’est la plus puissante turbine hydraulique à impulsion jamais construite. Une machine de 500 mégawatts, capable à elle seule de faire tourner une ville entière.
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Une turbine géante pour faire tourner une centrale hydroélectrique avec 671 mètres de chute
Tout commence dans le massif tibétain, là où les rivières ne se contentent pas de serpenter : elles plongent. À la centrale hydroélectrique de Datang Zala, l’eau descend l’équivalent de deux tours Eiffel l’une sur l’autre, soit 671 mètres de chute. Autant vous dire que quand cette masse d’eau arrive en bas, elle ne demande qu’à exploser de puissance.
C’est là qu’intervient la fameuse turbine. Elle transforme l’énergie de l’eau en mouvement de rotation, puis en électricité. Rien de magique : c’est juste de la physique… mais à une échelle jamais vue !
Une machine taillée pour encaisser les coups
Pour que cette turbine tienne le choc, il fallait du costaud. Résultat : 88 tonnes d’acier martensitique, un matériau inoxydable qu’on retrouve aussi dans certaines pièces d’avion. Elle a été entièrement conçue et fabriquée par Harbin Electric, une entreprise chinoise qui n’a pas lésiné sur les moyens avec pas moins de quatre ans de recherche, d’essais, de réglages.
Quand elle tourne, cette turbine ne rigole pas. Elle encaissera jour et nuit la pression de l’eau, les vibrations, les micro-chocs… C’est un peu comme si vous faisiez du vélo dans un orage permanent, en gardant l’équilibre pendant vingt ans.
Ce petit pourcent qui change tout
Continuons avec un autre chiffre qui témoigne de la performance de la turbine : 92,6 % de rendement. En clair, presque toute l’énergie de l’eau est transformée en électricité. Ce n’est pas un simple chiffre sur un papier. Ce “petit” gain de 1,6 % par rapport aux anciennes turbines, ça fait 190 000 kilowattheures de plus chaque jour. C’est comme si on ajoutait une petite centrale bonus, sans consommer plus d’eau !
Une centrale pour 4 milliards de kilowattheures
Quand les deux turbines seront installées, la centrale de Zala produira près de 4 milliards de kWh par an. C’est l’équivalent de la consommation de 1,3 million de foyers chinois. Et surtout, c’est 1,4 million de tonnes de charbon qu’on ne brûlera pas, 3,7 millions de tonnes de CO₂ de moins dans l’atmosphère. Une façon très concrète d’avancer vers la promesse de neutralité carbone que la Chine s’est fixée pour 2060.
Que la partie visible de l’iceberg hydraulique chinois
Ce projet s’inscrit dans une stratégie nationale XXL. Depuis quelques années, la Chine multiplie les barrages, modernise ses turbines, et surtout développe à grande échelle le pompage-turbinage. Le principe ? Quand il y a trop d’électricité sur le réseau (par exemple en plein après-midi avec du soleil à gogo), on utilise ce surplus pour remonter de l’eau dans un réservoir en hauteur. Quand la demande augmente, on la laisse redescendre pour produire du courant en quelques secondes.
Actuellement, plus de 200 gigawatts de projets hydro sont en construction ou validés et la Chine veut dépasser les 130 gigawatts de pompage-turbinage d’ici 2030. C’est vertigineux.
Une fierté technologique qui turbine fort
Cette turbine de Zala, c’est bien plus qu’un bout de métal qui tourne. C’est une démonstration. La Chine veut prouver qu’elle peut concevoir, tester et produire des infrastructures de cette taille sans aide étrangère. Le message est clair : l’indépendance énergétique passe aussi par la maîtrise des technologies les plus extrêmes.
Alors oui, cette turbine ne fera pas rêver comme un vaisseau spatial. Elle ne parle pas, ne bouge pas toute seule, n’a pas d’intelligence artificielle mais elle transforme une rivière en lumière.
Et ça, c’est peut-être encore plus puissant.
Les plus grands barrages du monde par puissance
Barrage | Pays | Puissance totale (MW) | Nombre de turbines principales | Puissance par turbine (MW) | Année de mise en service |
Trois Gorges | Chine | 22 500 | 32 | 700 | 2003-2012 |
Itaipu | Brésil/Paraguay | 14 000 | 20 | 700 | 1984-2007 |
Xiluodu | Chine | 13 860 | 18 | 770-855 | 2013-2014 |
Belo Monte | Brésil | 11 233 | 18 | 611-611 | 2016-2019 |
Guri | Venezuela | 10 200 | 20 | 730-770 | 1978-1986 |
Tucuruí | Brésil | 8 370 | 25 | 350 | 1984-2006 |
Grand Coulee | États-Unis | 6 810 | 24 | 125-805 | 1942-1980 |
Xiangjiaba | Chine | 6 448 | 8 | 800 | 2012 |
Longtan | Chine | 4 900 | 9 | 700 | 2007 |
Jinping-1 | Chine | 3 600 | 6 | 600 | 2014 |
Source : http://kpzg.people.com.cn/n1/2025/0703/c404214-40513662.html
Merci pour la qualité d’écriture de votre article: c’est de la belle vulgarisation scientifique.
Bonjour Mr Aigron, vos articles sont toujours très intéressants.
Merci
C Coubard
2 x la tour Eifel comme chute, ce n’est rien.
La chute d’eau de la Grande Dixence en Suisse est de seulement 1’883 m (Mille, huit cents, 4 x 20 et 3 m)
Ce qui donne une pression de plus de 183 bar, dans la conduite forcée à l’entrée de la centrale et sur les augets