La Corée du Sud bouscule la chimie des électrodes pour proposer de l’hydrogène vert à bas coût.
C’est un problème qui restait jusqu’ici sans solution : comment produire de l’hydrogène propre, en quantité et à bas coût ? Pourtant il semble qu’une équipe de chercheurs sud-coréens de l’université Hanyang (campus ERICA) aient trouver un début de piste avec un nouveau catalyseur nanométrique à base de cobalt, phosphore et bore, capable d’améliorer nettement l’efficacité des réactions électrochimiques tout en réduisant la facture. Nouvel espoir vert en vue ?
Lire aussi :
- Les Etats-Unis sont parvenus à résoudre un triple problème qui empêchait la réalisation des premiers avions à hydrogène
- Première mondiale pour ces chercheurs allemands qui ont réussi l’impossible en synthétisant un atome d’hydrogène avec six neutrons grâce à l’accélérateur MAMI
Un nouveau catalyseur sans métaux rares permettrait de produire de l’hydrogène vert en quantité et à bas coût
Le problème de l’hydrogène vert ne vient ni de l’apport en eau ni de l’électricité bas carbone (de plus en plus accessible). Non le maillon faible restait jusqu’ici les catalyseurs, ces matériaux qui rendent la séparation de l’eau possible sans y mettre un milliard de volts ni recourir à des métaux rares comme le platine.
Ici, pas de platine, mais du cobalt phosphuré, enrichi en bore et structuré à l’échelle nanométrique grâce à une nouvelle technique : les metal-organic frameworks (MOFs) ou les structures métallo-organiques en français. Ces structures poreuses à base de cobalt sont déposées sur une mousse de nickel, puis modifiées par réaction chimique avec du borohydrure de sodium. On y ajoute ensuite du phosphore via du hypophosphite de sodium, à des doses précises.
Trois échantillons sont alors créés avec différentes teneurs en phosphore, mais c’est celui préparé avec 0,5 gramme de NaH₂PO₂ qui s’en sort le mieux : une surtension de seulement 95 millivolts pour la réaction de réduction de l’eau en hydrogène (HER) et 248 millivolts pour l’oxydation (OER). En langage d’électrochimiste : très efficace, et très économe.
Une structure poreuse idéale pour l’électrochimie
Ces matériaux présentent deux atouts majeurs. D’abord, une grande surface active. Ensuite, une structure mésoporeuse, autrement dit : des trous de la bonne taille pour faciliter le transport des électrons et des ions tout au long de la réaction.
Le dopage au bore et l’ajustement fin du taux de phosphore permettent d’optimiser les interactions entre le catalyseur et les intermédiaires de réaction, ce qui explique leurs performances remarquables. Les chercheurs ont d’ailleurs confirmé ces effets à l’aide de simulations en théorie de la fonctionnelle de la densité (DFT), une méthode numérique souvent utilisée en physique quantique.
Une production plus propre, à moindre coût
Ce qui rend ces résultats particulièrement intéressants, c’est qu’ils s’inscrivent dans une logique de production industrielle. Les matériaux sont peu coûteux, disponibles en grande quantité, et les procédés peuvent être transposés à l’échelle d’un électrolyseur complet.
L’électrolyse de l’eau, lorsqu’elle est alimentée par des sources renouvelables (solaire, éolien), permet de produire de l’hydrogène totalement décarboné. Mais jusqu’ici, les électrolyseurs efficaces dépendaient de métaux rares… ou coûtaient trop cher. Ce nouveau catalyseur pourrait abaisser sensiblement le prix au kilo d’hydrogène vert, ce qui le rendrait enfin compétitif par rapport à son équivalent fossile, le méthane vapeur-reformé.
Un marché de l’hydrogène vert en plein boom
Le marché mondial de l’hydrogène vert est estimé à environ 1,3 milliard d’euros en 2025 et pourrait dépasser les 18 milliards d’euros d’ici 2032, soit une croissance de 45% par an en moyenne. On comprend dès lors l’effervescence autour de cette énergie, certes loin d’être encore parfaite mais prometteuse.
En France, le plan national prévoit quand à lui une capacité de production de 4,5 GW d’ici 2030 ,dopés par les quelques 9 milliards d’euros d’investissement et plus de 150 projets en cours.
Le coût de production moyen, appuyé par des découverte comme celle de cet article, pourrait descendre à environ 5 euros par kilogramme dès 2025, ce qui rend l’hydrogène renouvelable bien plus attractif pour les industries. Les secteurs de la mobilité lourde, de la sidérurgie et du transport maritime, via la production d’ammoniac vert, sont déjà en phase d’intégration. Avec des réglementations de plus en plus contraignantes comme en UE où 42 % de l’hydrogène industriel qui devra être renouvelable d’ici 2030, les innovations comme celle venue de Corée du Sud ont donc une belle carte à jouer.
Une réponse scientifique à une urgence climatique
Le contexte énergétique mondial est tendu, et le besoin d’alternatives propres est pressant. Si ce catalyseur tient ses promesses hors du laboratoire, il pourrait jouer un rôle-clé dans la transition énergétique à grande échelle, notamment pour les industries qui ne peuvent pas être électrifiées directement (sidérurgie, transport maritime, chimie lourde).
Ce n’est pas encore demain que l’hydrogène propre coulera à flot dans nos réseaux. Mais avec ce type d’innovation, pensée pour l’industrie, basée sur des matériaux abordables, et appuyée par des simulations robustes, on s’en rapproche, mètre par mètre.
Sources (chiffres marché hydrogène vert) :
- https://www.pv-magazine.fr/2022/06/01/le-prix-de-lhydrogene-vert-pourrait-tomber-a-5-e-kg-dici-a-2025
- https://www.economie.gouv.fr/files/2025-04/strategie_nationale_hydrogene_decarbone_2025.pdf
Source article scientifique :
Tunable B-Doped Cobalt Phosphide Nanosheets Engineered via Phosphorus Activation of Co-MOFs for High Efficiency Alkaline Water-Splitting
Dun Chan Cha, Jun Ho Seok, Seong Chan Cho, Manjinder Singh, Thangjam Ibomcha Singh, Sang Uck Lee, Seunghyun Lee
Publié le : 19 mars 2025
https://doi.org/10.1002/smll.202500334
Image : Branche de chargeur de véhicule électrique avec affichage numérique (Freepik)
Cet article a été écrit, relu et corrigé par les journalistes de la rédaction de Média24.fr à l’aide des sources renseignées ci-dessus. Il peut contenir des passages générés par IA pour du texte, des tableaux ou des images afin d’améliorer l’expérience du lecteur.