Séquençage du génome : du rorqual bleu à la musaraigne étrusque
En génétique, la taille n’est pas un critère de différenciation quand il s’agit de séquencer le génome des créatures peuplant notre planète. C’est ce qu’une équipe de chercheurs de l’Institut Morgridge pour la Recherche a récemment démontré en assemblant les séquences génomiques de deux êtres vivants aux antipodes en termes de dimensions : le rorqual bleu, le mammifère le plus grand de la planète, et la musaraigne étrusque, l’un des plus petits.
Un exploit scientifique de taille
Le séquençage du génome du rorqual bleu a été publié dans la revue Molecular Biology and Evolution, tandis que celui de la musaraigne étrusque a trouvé sa place dans le journal Scientific Data. Cette prouesse technique illustre parfaitement le principe selon lequel la taille ne limite pas les possibilités dans le domaine du séquençage génomique.
Yury Bukhman, premier auteur de cette recherche et biologiste computationnel dans le groupe de calcul Ron Stewart à l’Institut Morgridge, souligne l’importance de ces découvertes : “Le génome est le plan d’un organisme.” Cette connaissance fondamentale ouvre la porte à des avancées significatives dans la manipulation des cultures cellulaires et la compréhension de l’expression génique, pavant ainsi la voie à de nouvelles recherches.
Des implications larges pour la biologie et la médecine
La sélection du rorqual bleu et de la musaraigne étrusque pour ces études n’est pas fortuite. Elle s’inscrit dans une quête de compréhension des mécanismes biologiques régissant l’horloge développementale. Les organismes plus grands prennent naturellement plus de temps pour se développer d’un œuf fécondé à un adulte, mais les raisons sous-jacentes restent encore à élucider.
Les découvertes relatives à ces génomes ouvrent des perspectives dans le domaine des thérapies basées sur les cellules souches, mais également dans la résolution de mystères biomédicaux comme le paradoxe de Peto. Ce dernier observe que malgré un nombre plus important de divisions cellulaires, les grands mammifères comme les baleines et les éléphants ont une longévité supérieure et sont moins susceptibles de développer des cancers que des mammifères plus petits.
Vers une meilleure compréhension du métabolisme
Le séquençage du génome de la musaraigne étrusque, quant à lui, permettra d’approfondir les connaissances sur le métabolisme. Avec ses besoins énergétiques élevés, ce petit mammifère constitue un modèle d’étude particulièrement intéressant pour étudier la régulation du métabolisme.
Un projet collaboratif d’envergure internationale
Ces projets de génome s’inscrivent dans le cadre d’un effort collaboratif international, en lien avec le Projet des Génomes Vertébrés (VGP). L’objectif de ce consortium est de fournir des génomes de référence de haute qualité pour toutes les espèces de vertébrés vivants. Les méthodes avancées utilisées, notamment le séquençage de longues séquences, permettent de surmonter les limitations des technologies antérieures et d’offrir des cartes génomiques plus complètes et précises.
Conservation des espèces et avancées futures
Outre son intérêt fondamental, la disponibilité de génomes de référence joue un rôle crucial dans la conservation des espèces. Le rorqual bleu, ayant frôlé l’extinction au XXe siècle, bénéficie aujourd’hui d’une protection internationale. La connaissance approfondie de son génome favorise une meilleure compréhension de sa structure populationnelle et de sa diversité génétique, essentielles à sa préservation.
Une quête sans frontières
Le séquençage des génomes du rorqual bleu et de la musaraigne étrusque marque une étape importante dans la compréhension de la complexité du vivant. Au-delà de la prouesse scientifique, ces travaux soulignent l’importance de la collaboration internationale et de l’innovation technologique dans la résolution des grands mystères biologiques et médicaux.
Source de l’article : https://www.nature.com/articles/s41597-024-03011-x