L’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes (Arcep) a publié son rapport annuel sur l’état de l’internet en France, mettant en lumière les divers aspects de notre écosystème numérique. Parmi les points saillants, le trafic entrant au point d’interconnexion en France a été particulièrement mis en avant. En 2023, il a atteint 46,5 Tbit/s, marquant une augmentation de 7,6 % par rapport à l’année précédente. Cette croissance, bien que positive, marque un ralentissement significatif par rapport à l’augmentation de 21 % enregistrée entre fin 2021 et fin 2022.
Environ 53 % de ce trafic provient de cinq principaux acteurs : Netflix, Akamai, Facebook, Google, et Amazon. L’optimisation de ce trafic est facilitée par le développement continu des Content-Delivery-Network (CDN) internes des opérateurs télécoms, qui gèrent désormais 20% du trafic entrant.
Origine du trafic internet en France
L’analyse de l’origine du trafic internet en France révèle des dynamiques intéressantes parmi les acteurs principaux. En 2023, Netflix continue de dominer avec une part de 15,3 % du trafic total, bien que cette part ait diminué depuis 2022 où elle était de 19,7 %. Cette baisse pourrait refléter une diversification des sources de contenu consommé ou une optimisation plus efficace du trafic par d’autres moyens. Parallèlement, Akamai, un CDN spécialisé dans la distribution de contenu, voit sa part augmenter significativement de plus de 3 points pour atteindre 12,3 %. Cette hausse est probablement due à l’augmentation de la demande pour des contenus vidéo, qui nécessitent souvent une distribution via des CDN pour réduire la latence et améliorer l’accès pour l’utilisateur final.
Google et Meta montrent une légère régression dans leurs parts, avec des chiffres qui passent à 9,8 % et 6,8 % respectivement, tandis qu’Amazon diminue aussi légèrement à 6,4 %. Twitch, également une propriété d’Amazon, connaît une réduction plus marquée de sa part de trafic, passant de 3 % à 2,1 %. En contraste, Bytedance, la maison mère de TikTok, connaît une croissance notable, doublant son volume de trafic depuis 2021.
Il est important de noter que ce panorama ne représente que les acteurs directement connectés au point d’interconnexion des FAI. De nombreux fournisseurs de services populaires, tels que les chaînes de télévision françaises ou des plateformes comme Disney Plus, acheminent leur trafic via des CDN ou d’autres intermédiaires, ce qui masque leur véritable impact sur le trafic total observé. Ce mode de distribution via des intermédiaires, tout en étant efficace pour la gestion du trafic, peut parfois occulter la représentation réelle de l’utilisation des services par les utilisateurs finaux dans les mesures traditionnelles du trafic internet.
L’explosion du trafic internet en France : quels sont les vrais gagnants ?
Poursuite de la transition vers IPv6
La transition vers IPv6 reste un enjeu majeur pour l’intégrité future de l’internet. Selon l’Arcep et l’Afnic, 81 % des clients de l’internet fixe grand public et 66 % des clients mobiles sont désormais servis par IPv6, révélant des disparités notables entre les fournisseurs d’accès. Les hébergeurs de sites et d’e-mails, bien qu’en retard, montrent des améliorations avec un taux d’activation d’IPv6 passant de 8 % à 19 % pour les e-mails entre mi-2022 et mi-2023. La France se classe troisième mondiale en termes de raccordement à IPv6, derrière l’Inde et la Malaisie.
La neutralité du net sous surveillance
La neutralité du net demeure une priorité pour l’Arcep, qui s’efforce de maintenir un internet ouvert et accessible à tous. En 2023, l’outil de détection de priorisation Wehe a permis de réaliser plus de 13 000 tests en France, contribuant ainsi à un total de plus de 680 000 tests depuis son lancement. Ces efforts sont cruciaux pour s’assurer que tous les services en ligne bénéficient d’un accès équitable sans discrimination.
L’intelligence artificielle : une nouvelle frontière
L’édition 2024 du rapport de l’Arcep aborde pour la première fois les implications de l’intelligence artificielle générative sur internet. Cette technologie émergente, intégrant des chatbots et la génération d’images, pourrait redéfinir l’accès aux contenus en ligne. Une table-ronde est prévue pour discuter de ces enjeux, soulignant l’importance de cette évolution pour l’avenir de l’internet.
Nouvelles réglementations pour un espace numérique sécurisé
Le paysage réglementaire français s’est enrichi avec la promulgation de la loi sur la sécurisation de l’espace numérique. Cette loi confie à l’Arcep de nouvelles missions de régulation, notamment dans le marché du cloud et pour les prestataires de services d’intermédiation de données, anticipant ainsi le règlement européen sur les données (Data Act).
Vers un numérique plus durable
L’adoption du référentiel général de l’écoconception des services numériques marque un pas vers un numérique plus responsable. Ce référentiel, élaboré par l’Arcep, l’Arcom et l’ADEME, offre 78 fiches pratiques pour minimiser l’impact environnemental des services numériques.
Innovation dans la mesure de la qualité de service
L’intégration de l’API « carte d’identité de l’accès » dans les nouvelles box internet permet désormais une mesure plus précise des débits internet. Cette innovation est exemplaire de la manière dont la technologie peut servir à améliorer l’expérience utilisateur en rendant les comparaisons de débit plus fiables.
Le rapport 2024 de l’Arcep nous offre une vue d’ensemble sur les avancées et les défis de l’internet en France. Entre progression technologique et nécessité réglementaire, l’écosystème numérique français continue d’évoluer, sous la vigilance constante de l’Arcep. Le rôle de cette autorité est plus que jamais central dans la garantie d’un internet équitable, ouvert et innovant pour tous les utilisateurs.