Les réseaux cellulaires de sixième génération (6G) promettent des vitesses de transmission de données inégalées et une latence encore plus réduite que la 5G. Pour atteindre ces performances, les scientifiques misent sur les ondes térahertz, qui offrent une fréquence élevée et une capacité de transmission largement supérieure aux standards actuels. Toutefois, ces ondes sont particulièrement sensibles aux interférences électromagnétiques, ce qui complique leur exploitation à grande échelle.
Une équipe de chercheurs de l’Université de Tokyo, en collaboration avec Nippon Denko Co., Ltd., vient de développer un absorbeur électromagnétique révolutionnaire, permettant d’étendre considérablement l’utilisation des ondes térahertz dans les communications sans fil. Cette technologie, basée sur un film ultrafin de lambda-trititanium-pentoxide (λ-Ti₃O₅), offre une absorption efficace des ondes entre 0,1 et 1 térahertz (THz), une plage de fréquences jusque-là difficile à exploiter pour les réseaux mobiles.
Les enjeux des réseaux 6G et des ondes térahertz
Les réseaux 5G ont déjà marqué un tournant avec une latence réduite et des vitesses de connexion atteignant jusqu’à 20 gigabits par seconde. Cependant, les chercheurs explorent déjà la 6G, qui pourrait dépasser les 240 gigabits par seconde en s’appuyant sur les ondes térahertz.
Ces ondes, situées entre les micro-ondes et l’infrarouge dans le spectre électromagnétique, présentent un atout majeur : une capacité de transmission extrêmement élevée. Mais leur courte longueur d’onde les rend vulnérables aux perturbations électromagnétiques, limitant ainsi la fiabilité des transmissions.
Un absorbeur électromagnétique ultrafin pour améliorer la transmission
Jusqu’à présent, les absorbeurs disponibles sur le marché ne permettaient d’atténuer les interférences que pour des fréquences inférieures à 0,3 THz. La nouvelle innovation du laboratoire japonais ouvre donc la voie à des communications plus stables et performantes, en couvrant une plage allant jusqu’à 1 THz.
L’absorbeur est conçu à partir d’un oxyde métallique conducteur, encapsulé dans une couche de dioxyde de titane (TiO₂). Cette combinaison unique permet d’induire une dissipation des ondes parasites en dispersant le courant électrique généré par le champ électromagnétique.
“Lorsque l’onde térahertz traverse ce matériau, elle génère un courant alternatif dans la couche conductrice. Ce phénomène entraîne une perte d’énergie, ce qui réduit les interférences et améliore la qualité du signal,” explique le professeur Shin-ichi Ohkoshi de l’Université de Tokyo.
Une technologie adaptée aux usages extérieurs et aux environnements extrêmes
L’absorbeur développé présente plusieurs avantages pratiques :
- Épaisseur de seulement 48 micromètres, soit moins de la moitié d’un cheveu humain, ce qui le rend compatible avec les appareils compacts.
- Fabrication économique, le titane étant un élément abondant.
- Grande résistance aux éléments : insensible à la chaleur, à l’eau, aux solvants organiques et à la lumière, il peut être utilisé en extérieur sans altération de ses propriétés.
Ces caractéristiques ouvrent la voie à de nombreuses applications au-delà des télécommunications, notamment dans la surveillance médicale sans contact, l’imagerie tomographique pour l’inspection de la qualité des matériaux, ou encore les systèmes de détection de substances dangereuses.
Une étape vers une connectivité ultra-rapide et éco-responsable
Avec cette innovation, les chercheurs contribuent à lever l’un des principaux obstacles à l’implémentation des réseaux 6G : la réduction des interférences électromagnétiques. Cette avancée facilite l’intégration des ondes térahertz dans les futurs réseaux mobiles, tout en garantissant une transmission plus fiable et plus sécurisée.
“Nous avons encore un immense potentiel à explorer dans la science des matériaux pour améliorer la communication sans fil,” souligne Ohkoshi. “Notre objectif est désormais d’optimiser cet absorbeur pour accélérer son adoption industrielle et accompagner l’évolution vers un futur sans fil toujours plus rapide et respectueux de l’environnement.”
L’arrivée des premières infrastructures 6G est attendue à l’horizon 2030. Avec des technologies comme cet absorbeur ultrafin, la promesse d’une connectivité mobile ultra-haut débit semble plus proche que jamais.
Source de l’article : http://dx.doi.org/10.1021/acsami.4c17606