Ces géants des océans sont en train de disparaître… et personne n’en parle

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Les cétacés forment un groupe d’animaux marins aussi fascinant que méconnu, regroupant environ 90 espèces réparties dans les mers du globe. On y distingue principalement trois familles : les mysticètes (baleines à fanons), les odontocètes (dauphins, orques, cachalots) et les marsouins, plus discrets mais tout aussi marins.

Leur point commun fondamental : ce sont des mammifères marins, donc des animaux à sang chaud, respirant de l’air à l’aide de poumons, qui allaitent leurs petits et possèdent des comportements sociaux complexes.

Parmi les espèces les plus emblématiques, on retrouve :

  • La baleine bleue, plus grand animal ayant jamais existé sur Terre,
  • L’orque, parfois surnommée “baleine tueuse” mais en réalité un dauphin géant,
  • Le dauphin commun, agile et sociable, souvent observé près des côtes,
  • Le cachalot, dont les plongées abyssales en quête de calmars géants nourrissent les légendes.

Les cétacés sont présents dans tous les océans, du cercle polaire aux eaux tropicales. Certaines espèces sont migratrices et parcourent chaque année des milliers de kilomètres pour se reproduire ou s’alimenter.

Des adaptations spectaculaires à la vie aquatique

Nés sur terre il y a environ 50 millions d’années, les ancêtres des cétacés ont lentement évolué vers une vie entièrement marine. Leur corps a été profondément transformé au fil des millénaires pour s’adapter à ce nouvel environnement.

Leurs membres antérieurs sont devenus des nageoires, les postérieurs ont disparu, et leur queue s’est métamorphosée en puissante nageoire horizontale propulsive. Leur peau lisse et dépourvue de poils limite la friction dans l’eau, leur permettant des déplacements rapides et agiles.

La respiration reste cependant aérienne : les cétacés doivent remonter à la surface pour inspirer par un évent situé au sommet de leur crâne. Leur capacité à retenir leur souffle est remarquable, certains pouvant plonger plus d’une heure sans respirer.

Mais c’est surtout leur communication acoustique qui fascine. Les cétacés utilisent une variété de sons, sifflements, clics, chants, pour se repérer, chasser ou interagir. Chez les cachalots et les dauphins, ces sons forment de véritables langages complexes dont l’étude ne fait que commencer.

Enfin, leur alimentation est aussi variée que leur morphologie : les mysticètes filtrent le krill à l’aide de fanons, tandis que les odontocètes chassent poissons, calamars, voire d’autres mammifères marins.

Des géants en danger : menaces sur les cétacés

Les cétacés sont aujourd’hui confrontés à une crise d’extinction sans précédent. Sur les 93 espèces connues, plus de 46 % sont désormais considérées comme menacées par l’UICN, un bond préoccupant par rapport aux 15 % enregistrés en 1991. Ce chiffre traduit l’impact cumulé des activités humaines sur ces espèces marines emblématiques.

Certaines zones sont particulièrement critiques, notamment l’Asie du Sud-Est — où l’on retrouve un grand nombre d’espèces menacées — ainsi que les zones côtières et les habitats d’eau douce, où 100 % des cétacés sont menacés. Ces régions concentrent un niveau de pression sans équivalent, entre urbanisation, pêche intensive et pollution chronique.

Captures accidentelles : 300 000 morts par an

Les captures accidentelles dans les filets de pêche sont la menace la plus immédiate et la plus dévastatrice. Chaque année, environ 300 000 dauphins, baleines et marsouins meurent, pris au piège dans des engins de pêche non sélectifs. Filets maillants, chaluts, sennes coulissantes : les outils diffèrent, mais les conséquences restent tragiques (Source https://hval.whales.org/en/meet-the-whales/their-biggest-threats/).

Dans le Pacifique tropical oriental, certaines techniques ciblent délibérément des groupes de dauphins pour localiser les thons en profondeur, entraînant une mortalité collatérale massive. Plus les animaux se débattent, plus ils s’enchevêtrent et finissent par se noyer.

Changement climatique : menace invisible mais radicale

Le réchauffement climatique aggrave la situation, surtout dans l’Arctique, où la glace disparaît à un rythme quatre fois plus rapide que la moyenne mondiale. Les baleines boréales, narvals et bélugas, étroitement liés aux environnements gelés, voient leur habitat fondre sous leurs nageoires.

Cette fonte perturbe aussi l’abondance des proies, modifie les routes migratoires et rendra certaines zones de reproduction invivables d’ici quelques décennies, notamment pour les baleines à bosse. Les effets combinés de la température et de la raréfaction des ressources pourraient entraîner des effondrements de population irréversibles.

Collisions avec les navires : 30 000 morts annuelles

Jusqu’à 30 000 baleines par an seraient tuées ou gravement blessées suite à des collisions avec des navires. Ce phénomène est en constante augmentation avec l’intensification du trafic maritime mondial (https://worldcetaceanalliance.org/what-we-do/protecting-whales-from-ship-strikes/).

Les baleines lentes, souvent concentrées dans des zones de migration, d’alimentation ou de reproduction proches des routes commerciales, sont particulièrement touchées. Réduire la vitesse des navires à moins de 10 nœuds pourrait pourtant diviser drastiquement ce risque — une solution simple, mais encore peu appliquée.

Pollution plastique : un poison discret mais omniprésent

Au moins 12 millions de tonnes de plastique sont déversées chaque année dans l’océan. Les cétacés en souffrent directement : 81 espèces de mammifères marins sont connues pour avoir ingéré ou été empêtrées dans du plastique. Chaque année, ce fléau tuerait environ 100 000 individus.

Les microplastiques, encore plus pernicieux, s’accumulent dans les tissus et organes internes des cétacés. Leur ingestion entraîne des perturbations physiologiques durables, dont l’impact global reste mal connu mais potentiellement catastrophique à long terme.

Pollution sonore : un océan devenu invivable

Le bruit sous-marin, causé par les sonars, le trafic, l’extraction pétrolière ou les chantiers offshore, perturbe gravement les capacités de communication et de navigation des cétacés. Pour des espèces qui dépendent du son comme principal sens, ces nuisances peuvent entraîner stress, désorientation, échouages et même la mort.

Certains sonars militaires ont été directement impliqués dans des échouages massifs. Les animaux, paniqués ou blessés, fuient les zones bruyantes, abandonnant parfois des habitats cruciaux.

Pollution chimique : l’accumulation toxique

Les polluants chimiques persistants, tels que les PCB, les métaux lourds et les pesticides, s’accumulent dans les graisses et les organes des cétacés, affectant leur reproduction et leur immunité. En Europe, certaines orques présentent des niveaux de PCB si élevés qu’elles ne se reproduisent plus.

La Méditerranée est l’un des bassins les plus touchés, du fait de sa configuration semi-fermée. Le mercure, extrêmement toxique, y atteint des concentrations alarmantes chez les cétacés côtiers.

Les plus menacés : vaquita, baleine noire, orque du Sud

  • Le vaquita, marsouin du golfe de Californie, compte moins de 20 individus survivants.
  • La baleine noire de l’Atlantique Nord est passée sous la barre des 350 spécimens, dont seulement 70 femelles reproductrices.
  • L’orque résidente du Sud ne compte que 73 individus recensés en 2024.

Ces espèces symbolisent l’extrême urgence d’une action coordonnée à l’échelle mondiale pour éviter leur disparition définitive.

Observer, comprendre, protéger

Face à la multiplication des menaces, la protection des cétacés nécessite une mobilisation scientifique, politique et citoyenne à l’échelle planétaire. Le constat est clair : près de la moitié des espèces de cétacés sont menacées, et les tendances continuent de se dégrader. Il devient impératif de renforcer les solutions existantes et d’en développer de nouvelles.

Aires marines protégées : un outil encore sous-exploité

Les aires marines protégées (AMP) sont un levier essentiel pour préserver les habitats clés des cétacés, qu’il s’agisse de zones d’alimentation, de migration ou de reproduction. Pourtant, la majorité des AMP actuelles sont trop petites ou peu efficaces, et certaines ne sont que des zones « protégées » de nom.

L’UICN recommande désormais 30 % d’océans protégés efficacement d’ici 2030. Pour atteindre cet objectif, les AMP doivent :

  • Couvrir des zones vastes et écologiquement cohérentes ;
  • Être efficacement surveillées et contrôlées ;
  • Prendre en compte les besoins biologiques spécifiques des espèces ciblées.

Technologies et pratiques de pêche responsables

Réduire les captures accidentelles (bycatch) passe par l’adoption de nouveaux engins de pêche : filets modifiés, dispositifs d’exclusion, zones d’exclusion temporelle ou géographique, détection acoustique.

Ces outils peuvent réduire significativement la mortalité des cétacés sans compromettre les rendements de pêche. Mais leur déploiement reste trop limité, faute de volonté politique, de financement ou de coordination internationale.

Vitesse des navires : une solution simple et efficace

Limiter la vitesse des navires à 10 nœuds est l’un des moyens les plus efficaces pour réduire les collisions fatales avec les cétacés. Cette mesure a l’avantage :

  • De réduire drastiquement la mortalité,
  • De diminuer les émissions polluantes,
  • Et de limiter le bruit sous-marin.

Malgré ces bénéfices, 80 % du trafic maritime continue de circuler à des vitesses supérieures, y compris dans des zones identifiées comme sensibles.

Tourisme d’observation : un équilibre fragile

Le tourisme d’observation des cétacés est un secteur en plein essor, pesant plus de 2 milliards de dollars et générant des milliers d’emplois. Bien géré, il peut jouer un rôle éducatif et économique positif.

Mais mal encadré, il dérange les cétacés, perturbe leur comportement et peut compromettre leur reproduction. Les réglementations doivent impérativement limiter la proximité, le nombre de bateaux, et la durée des observations.

Menaces émergentes : l’exploitation minière des grands fonds

Une nouvelle menace inquiète les scientifiques : l’exploitation minière en mer profonde. Ce type d’activité industrielle pourrait détruire des habitats sous-marins essentiels et perturber la communication des cétacés via le bruit et les vibrations.

Des études montrent que les baleines bleues et d’autres cétacés peuvent être affectés à des dizaines de kilomètres des sites d’extraction. L’ouverture imminente de cette exploitation commerciale soulève des questions urgentes de gouvernance et de précaution.

L’alerte est donnée, l’action doit suivre

L’urgence est désormais connue. L’inaction ou les demi-mesures n’endigueront pas l’effondrement en cours. Les scientifiques, ONG, États et citoyens doivent coopérer pour :

  • Mettre en œuvre des réglementations plus strictes,
  • Investir dans la recherche et l’innovation écologique,
  • Impliquer les populations locales et le grand public,
  • Et surtout, agir rapidement.

Sans cette mobilisation globale, des espèces comme le vaquita ou la baleine noire pourraient disparaître dès cette décennie.

En résumé

  • 46,2 % des espèces de cétacés sont désormais menacées d’extinction, selon l’UICN.
  • Les AMP doivent être renforcées pour protéger efficacement les habitats marins.
  • Limiter la vitesse des navires à 10 nœuds peut sauver des milliers de baleines chaque année.
  • De nouvelles menaces émergent, comme l’exploitation minière des fonds marins.
  • L’humanité a les moyens d’agir, mais le temps pour le faire se réduit rapidement.

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Eric GARLETTI
Eric GARLETTIhttps://www.eric-garletti.fr/
Je suis curieux, défenseur de l'environnement et assez geek au quotidien. De formation scientifique, j'ai complété ma formation par un master en marketing digital qui me permet d'aborder de très nombreux sujets.

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