La supraconductivité, c’est un phénomène fascinant : un matériau devient capable de transporter du courant sans aucune résistance. Plus de perte d’énergie sous forme de chaleur, plus de dissipation parasite : un courant électrique qui tourne en boucle indéfiniment. Un rêve pour les ingénieurs, une curiosité pour les physiciens, et pourtant… une propriété bien réelle.
Mais il y a un hic. Jusqu’à présent, ces matériaux n’acceptent de se comporter ainsi qu’à des températures effroyablement basses. On parle de -269°C pour le plus célèbre d’entre eux, le niobium-titane. Un caprice qui oblige les chercheurs à plonger ces matériaux dans des bains d’hélium liquide, un procédé coûteux et difficilement applicable à grande échelle.
C’est là qu’entre en scène une découverte récente, qui relance l’espoir d’une supraconductivité accessible… à température ambiante.
Une limite naturelle… mais pas infranchissable
Un groupe de chercheurs, dirigé par le professeur Kostya Trachenko de la Queen Mary University de Londres, s’est attaqué à une question fondamentale : jusqu’où peut-on réellement monter la température critique d’un supraconducteur ?
Car oui, il existe une limite dictée par les lois mêmes de la physique. Cette température critique, que l’on note Tₙ, est déterminée par des constantes fondamentales :
- La masse de l’électron, minuscule mais omniprésente.
- La charge de l’électron, qui gouverne les interactions électriques.
- La constante de Planck, qui régit les phénomènes quantiques.
Et la bonne nouvelle, c’est que cette limite naturelle se situe quelque part entre 100 et 1000 kelvins. Autrement dit, la température ambiante fait partie du jeu !
Un équilibre cosmique… et du thé froid ?
Imaginez un instant un univers parallèle où ces constantes auraient des valeurs différentes. Si elles fixaient Tₙ à un millionième de kelvin, alors la supraconductivité serait tellement faible qu’elle serait passée totalement inaperçue. À l’inverse, si la température critique atteignait un million de kelvins, les fils électriques de votre bouilloire ne chaufferaient même plus : ils supraconduiraient !
Résultat : impossible de faire chauffer de l’eau pour son thé. Un drame.
Ce constat est fascinant : la chasse aux supraconducteurs à température ambiante ne serait pas une simple question d’ingéniosité humaine, mais un effet direct des constantes physiques qui régissent notre univers.
Pourquoi cette découverte est un tournant ?
Jusqu’à présent, la course aux supraconducteurs s’apparentait à un sprint aveugle. Les chercheurs tentaient, par essais et erreurs, d’identifier des matériaux capables de maintenir la supraconductivité à des températures de plus en plus élevées. Désormais, ils savent que le Saint-Graal est à portée de main.
Cette découverte trace une route : elle prouve que la supraconductivité à température ambiante n’est pas une utopie mais un objectif réaliste. Une confirmation précieuse pour les chercheurs qui travaillent sur des supraconducteurs exotiques, comme les hydrures d’hydrogène dopés sous pression extrême.
Bientôt une révolution technologique ?
Si un tel matériau était découvert et exploitable industriellement, les implications seraient monumentales.
- Fini les pertes d’énergie dans les lignes électriques : une efficacité énergétique inégalée.
- Des trains à lévitation magnétique plus simples, sans besoin d’aimants refroidis à l’azote liquide.
- Des ordinateurs quantiques stabilisés, puisque la supraconductivité y joue un rôle clé.
- Des IRM plus performantes et moins coûteuses, car elles reposent sur des bobines supraconductrices.
Bref, un changement de paradigme.
Ce qu’il faut retenir
- La supraconductivité permet un transport du courant sans aucune résistance.
- Jusqu’à présent, elle n’existe qu’à des températures extrêmement basses.
- Des chercheurs ont montré que la température critique maximale est dictée par des constantes fondamentales.
- Cette limite est située entre 100 et 1000 K, ce qui inclut la température ambiante.
- Cela signifie que des supraconducteurs à température ambiante sont théoriquement possibles.
- Cette découverte relance la quête d’un matériau révolutionnaire aux applications extraordinaires.
Source de l’étude : http://dx.doi.org/10.1088/1361-648X/adbc39
À température ambiante peut-être, mais encore faut-il que cela soit à pression atmosphérique. Parce qu’il me semble que des supraconducteurs à température ambiante, il en existe déjà mais à 1’000’000 de bars