Pour la première fois de l’histoire une équipe a créé du carbone liquide en laboratoire.
Une équipe vient de réaliser un exploit qui semblait inaccessible aux chercheurs du monde entier depuis des années : créer du carbone liquide ! Une équipe dirigée par l’Université de Rostock et le Helmholtz-Zentrum Dresden-Rossendorf (HZDR) est parvenue à ce petit miracle scientifique en utilisant un laser britannique d’une puissance exceptionnelle : le Dipole 100-X. Cette première mondiale pourrait également avoir de fortes conséquences sur la recherche d’un autre “miracle scientifique” : la fusion nucléaire.
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Grande première mondiale en Allemagne où une équipe a réussi à synthétiser du carbone sous état liquide
Contrairement au carbone solide (comme le diamant ou le graphite), sa forme liquide n’existe pas dans la nature et est réputée comme étant quasiment impossible à synthétiser.
La seule recette connue consiste à dépasser les 4 500°C, en tenant des pressions gigantesques de plusieurs gigapascals. Pour obtenir un résultat tangibles de quelques fractions de secondes, il a fallu compter sur l’installation DiPOLE 100-X et les puissants faisceaux de rayons X du European XFEL en Allemagne. Des impulsions laser ultra-courtes, de l’ordre de quelques nanosecondes, ont comprimé et chauffé des échantillons de carbone vitreux, atteignant jusqu’à 160 gigapascals.
Le DiPOLE 100-X en quelques mots
Le Dipole 100-X est un laser britannique, développé par le Central Laser Facility (CLF) du STFC et l’Université d’Oxford. Il fait partie des lasers solides pompés par diodes les plus puissants au monde, délivrant jusqu’à 150 joules par impulsion à 1030 nm et jusqu’à 10 tirs par seconde. Dans la catégorie des lasers à impulsion nanoseconde de classe kilowatt, il occupe une place de référence mondiale, étant considéré comme un recordman dans sa gamme. Il est utilisé notamment au sein du consortium européen HiBEF et à l’EuXFEL, pour la recherche sur la matière sous conditions extrêmes comme dans le cas présent pour le carbone liquide.
Une matière aux propriétés inattendues
L’expérience a mené à des mesures précises réalisées par l’équipe, qui lèvent le voile sur le carbone liquide , très semblable à l’eau dans sa capacité à former des liaisons temporaires. Un état fascinant qui donne une idée de ce qui se passe au centre de planètes géantes comme Neptune et Uranus.
Le professeur Dominik Kraus, coordinateur de l’étude, souligne : « C’est la première fois que nous parvenons à observer directement la structure du carbone liquide. Nous confirmons ainsi les prédictions des simulations. C’est un liquide d’une grande complexité, qui offre des propriétés uniques. »
De nouvelles perspectives pour la fusion ?
Si cette grande première enthousiasme tant le monde scientifique, c’est aussi car le carbone liquide pourrait devenir un acteur clé des futurs réacteurs à fusion nucléaire. Avec son point de fusion extrêmement élevé, il peut jouer le rôle de modérateur, ralentissant les neutrons pour entretenir les réactions en chaîne. Il pourrait aussi servir d’agent de refroidissement, une fonction essentielle dans des systèmes qui doivent dissiper des températures colossales.
La fusion nucléaire repose sur la maîtrise de températures et de pressions extrêmes. Le carbone liquide, désormais mieux compris, offre donc des pistes pour concevoir des réacteurs plus efficaces, et plus résistants à la chaleur.
Résultats publiés, applications envisagées
L’étude, parue dans la revue Nature, met fin à des débats qui animaient la communauté scientifique depuis des années. Les mesures précises du point de fusion du carbone écartent désormais les incertitudes sur ses propriétés thermiques et devraient permettre des études plus poussées et plus rapides sur le sujet.
Un premier pas vers un futur plus propre
Cette découverte illustre bien la manière dont la physique fondamentale peut déboucher sur des applications concrètes. Le carbone liquide, autrefois inatteignable, est désormais un domaine d’étude bien réel. Il pourrait contribuer à l’émergence de la fusion nucléaire, une source d’énergie propre et quasi inépuisable.
Les défis restent nombreux, mais les chercheurs ont démontré qu’avec des lasers de haute puissance et un peu d’audace, il est possible de faire parler la matière… même la plus insaisissable.
Source : https://www.ukri.org/news/uk-laser-creates-conditions-to-form-liquid-carbon-for-first-time
Image : L’instrument HED à European XFEL où DiPOLE 100-X a été installé. Crédit : Jan Hosan, European XFEL.