Svalbard, l’aéroport le plus au Nord du monde s’enfonce dans la glace.
Bienvenue à Longyearbyen, là où les avions atterrissent sur de la glace ! Construite dans les années 70 sur un sol gelé, la piste de l’aéroport de Svalbard en Norvège commence à présenter des signes d’affaissement alors que cette île a toujours été gelée depuis des millénaires. C’est la conséquence très concrète d’un permafrost qui fond et une preuve manifeste du réchauffement climatique.
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Svalbard a le record de l’aéroport régulier le plus au nord du monde mais le réchauffement climatique pourrait y mettre fin
Le Svalbard est un archipel norvégien situé dans l’océan Arctique, entre la mer de Barents, la mer du Groenland et la mer de Norvège, à environ 78° de latitude nord soit à 1 3000 km du Pôle Nord. Il comprend plus de 30 îles, dont les principales sont Spitzberg, Nordaustlandet, Edgeøya et Barentsøya, avec une superficie totale de plus de 61 000 km². La population est d’environ 3 000 habitants, principalement concentrée à Longyearbyen, la plus grande ville. Ce territoire autonome est démilitarisé et soumis à un statut particulier qui permet à plusieurs pays d’exploiter ses ressources. Le climat y est arctique, tempéré par le Gulf Stream, avec des étés frais et un soleil de minuit en été, tandis que l’hiver est marqué par la nuit polaire.
Un aéroport “record” pour la Norvège
L’aéroport de Svalbard est le plus septentrional du monde à accueillir des vols réguliers. On y vole depuis Tromsø ou Oslo grâce à SAS et Norwegian Airlines. L’avion est la seule option rapide pour rejoindre les 2 500 habitants de cet archipel, car le bateau met près de deux jours, en supposant que les conditions météo soient clémentes.
Depuis les années 1970, les avions se posent ici sur une piste de 2 300 mètres construite sur du permafrost. À l’époque, cette base glacée semblait aussi stable qu’un rocher. Aujourd’hui, elle se transforme en flaque molle chaque été, avec un sous-sol qui bouge… un peu trop.
« Pendant l’été, on inspecte la piste tous les jours. Le sol peut s’affaisser à tout moment », confie Ragnhild Kommisrud, directrice de l’aéroport.
Le permafrost fond, et tout devient instable
Le permafrost, c’est ce sol gelé en permanence depuis au moins deux ans (en réalité, souvent depuis des millénaires). Il constitue le fondement invisible des infrastructures de l’Arctique : routes, maisons, dépôts… et pistes d’atterrissage.
Mais depuis une dizaine d’années, ce sol se dégrade. Il fond en surface, puis en profondeur, créant des poches d’instabilité. Résultat : glissements de terrain, avalanches, fissures dans les structures. Et dans le cas d’un aéroport, ça devient immédiatement un problème de sécurité.
Les ingénieurs locaux doivent désormais composer avec un tarmac mouvant, une infrastructure essentielle qui risque de ne plus tenir debout d’ici quelques décennies sans interventions majeures.
Tourisme polaire et paradoxe climatique
Svalbard est devenue une destination prisée pour voir les aurores boréales, marcher sur les glaciers ou, pour les plus téméraires, croiser un ours polaire (de loin, si possible). Cette activité touristique, qui alimente l’économie locale, repos sur un climat extrême en voie de disparition.
Pendant que les visiteurs viennent admirer les effets du froid, le réchauffement lui mine lentement mais sûrement l’environnement.
C’est l’un des paradoxes de Svalbard : plus on en parle, plus on y va et plus on contribue à sa transformation.
Une île minière qui vire (lentement) vers les énergies propres
Historiquement, Svalbard vivait du charbon. Les premières implantations modernes y ont été motivées par l’exploitation des gisements. Aujourd’hui encore, l’ironie est frappante : l’aéroport menacé par le réchauffement climatique se trouve dans un ancien bastion de l’industrie fossile.
Mais les choses changent.
- La mine de Sveagruva a fermé en 2020.
- La centrale à charbon de Longyearbyen a cessé son activité en 2023.
- Une centrale diesel temporaire a pris le relais, divisant les émissions par deux.
Un projet de centrale au biogaz est en préparation pour 2026. Cette centrale alimentera notamment l’aéroport.
Le soleil comme allié inattendu
Svalbard a aussi installé une centrale solaire, malgré son emplacement extrême. Si elle reste quatre mois plongée dans l’obscurité hivernale, elle bénéficie aussi de quatre mois d’ensoleillement continu durant l’été arctique.
Cette utilisation mixte de l’énergie solaire et du biogaz montre une volonté d’adapter l’archipel aux nouvelles réalités climatiques, tout en maintenant les services essentiels comme l’aéroport. Car sans aéroport, il n’y a plus de tourisme, plus de ravitaillement rapide, et presque plus de vie organisée à Longyearbyen.
Un symbole fragile sur une frontière climatique
L’aéroport de Svalbard incarne les contradictions du XXIe siècle. C’est un point d’accès à un monde froid et isolé, rendu accessible par les technologies modernes, mais menacé par les dérèglements que ces mêmes technologies ont amplifiés.
Il faudra consolider le sol, peut-être reconstruire la piste, ou même repousser certaines activités plus au sud. Mais une chose est sûre : le permafrost ne redeviendra pas ce qu’il était. Et l’aéroport, comme toute l’infrastructure arctique, devra s’adapter ou disparaître.
Source : CNN