la Chine souffle sur la planète avec les éoliennes de Goldwind.
L’histoire du jour commence dans le désert, finit en mer, et remue aujourd’hui les capitales européennes. Goldwind, ancien outsider du Xinjiang, est devenu le n°1 mondial des fabricants d’éoliennes. Une ascension fulgurante dans un secteur dopé par les subventions, les ambitions écologiques… et désormais freiné par ses propres excès. Entre expansion tous azimuts, guerre commerciale larvée et virage vers les pays émergents, le géant chinois de l’éolien fait trembler la filière mondiale.
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L’histoire de l’ascension fulgurante de Goldwind
Dans les années 80, alors que la Chine ne fabrique encore guère plus que des bicyclettes, une petite entreprise installe des éoliennes dans les confins arides du Xinjiang. Elle s’appelle Xinjiang Wind Energy. À sa tête, Wu Gang, ingénieur passionné devenu entrepreneur.
C’est en 1998 que la société prend le nom de Goldwind. Et c’est en Angleterre, à Bristol, que Wu achète son premier logiciel de calcul aérodynamique. Sans un sou en poche, hébergé dans une auberge de jeunesse, il convainc son homologue britannique après trois jours de négociation. La scène ferait presque penser à un biopic et elle marque le départ d’un empire industriel qui ne semble pas connaître de limite.
Quelques chiffres sur Goldwind
Aujourd’hui, Goldwind est en tête du classement mondial des fabricants d’éoliennes, devant Siemens Gamesa, Vestas ou GE Vernova. avec 20 GW installés rien qu’en 2024 (3 fois la puissance totale de Kori en Corée du Sud, la plus puissante centrale nucléaire du monde). L’entreprise chinoise, cotée aux bourses de Shenzhen et Hong Kong, a réalisé un chiffre d’affaires de 6,5 milliards d’euros en 2023. Elle possède plus de 44 000 éoliennes en service dans le monde, représentant une capacité de production totale de plus de 89 GW. Goldwind a acquis 70% de la société allemande Vensys en 2008, renforçant ainsi sa position technologique. En 2023, l’entreprise a obtenu des commandes d’une valeur de 1,2 GW sur le marché européen, illustrant son expansion internationale.
Le marché chinois a connu un croissance sans limite
Depuis les années 2010, la Chine a accéléré le rythme d’installation d’éoliennes. En 2025 444 gigawatts de puissance éolienne sont déjà en service, soit 44 % des capacités mondiales. Et ce n’est qu’un début : des centaines d’autres gigawatts sont en cours de développement, selon Global Energy Monitor.
Dans ce décor, Goldwind bénéficie d’un soutien massif de l’État : subventions, commandes publiques, financement à bas coût, accès privilégié aux terres et aux ressources. Un rapport de l’OCDE publié en janvier 2025 le confirme : les aides perçues par les fabricants chinois dépassent largement celles octroyées dans les pays occidentaux.
Mais cette réussite locale engendre une surcapacité chronique : trop de turbines, pas assez de projets. Le remède ? Exporter, et vite.
Exportations tous azimuts et changement de nom
En 2023, Goldwind change de nom et abandonne la mention “Xinjiang” dans sa raison sociale officielle. Ce nouveau cap vise à se détacher de l’image associée à la répression des Ouïghours, qui nuit à son image à l’étranger, et à faciliter son expansion sur les marchés internationaux.
Et c’est dans les pays émergents que l’entreprise perce : Asie du Sud-Est, Afrique, Amérique latine… Des marchés où les concurrents occidentaux peinent à rester compétitifs en raison de la hausse des coûts logistiques, de la pandémie ou de la guerre en Ukraine.
Les routes de la soie version 2.0 de Pékin offrent à Goldwind un terrain de jeu géopolitique et énergétique de grande ampleur. Et grâce à une intégration verticale impressionnante, le groupe maîtrise toute la chaîne de production, des aimants permanents jusqu’à la logistique maritime.
L’Europe bien décidée à ne pas rendre les armes sans combattre
Face à cette marée d’éoliennes à bas prix, les industriels occidentaux tirent la sonnette d’alarme. Vestas, GE Vernova, et d’autres font état de leurs préoccupations par rapport à concurrence déloyale. En avril 2024, l’Union européenne ouvre une enquête sur les subventions d’État chinoises dans le secteur éolien.
Le message est clair : pas question de voir se répéter le scénario des panneaux solaires, où les fabricants européens ont été laminés par la concurrence chinoise en une décennie.
Pour Phil Cole, directeur de WindEurope (ssociation européenne basée à Bruxelles, qui promeut l’utilisation de l’énergie éolienne en Europe), la menace est stratégique :
“Sans chaîne d’approvisionnement européenne, on perd notre capacité à produire nos propres turbines, et donc notre autonomie énergétique.”
Des bastions occidentaux encore résistants
Malgré tout, les marchés européens et nord-américains ont sonné la révolte. Politiques protectionnistes, contraintes techniques spécifiques, sécurité des réseaux, qui commencent à limiter l’accès aux géants chinois
Autrement dit : Goldwind peut conquérir le monde, mais il n’a pas encore mis les pieds partout.
Une course contre la montre mondiale
Goldwind incarne la trajectoire chinoise dans les technologies vertes : une montée en puissance accélérée, souvent déséquilibrée, mais difficile à ignorer. Face à elle, les économies occidentales doivent choisir entre adaptation, protection ou coopération.
Et pendant ce temps, dans les ateliers de Goldwind, les turbines continuent de tourner… de plus en plus vite.
Sources :
- https://www.greenunivers.com/2024/04/la-rentabilite-du-turbinier-eolien-goldwind-se-degrade-en-2023-352937
- https://www.thewindpower.net/manufacturer_fr_71_goldwind.php