La Russie teste un combustible nucléaire nouvelle génération pour améliorer l’efficacité d’un réacteur de 600 MW et réduire les déchets.
Le nucléaire, s’il constitue une formidable source d’énergie, la plus importante sur Terre à l’exception d’un ou 2 barrages hydrauliques comme celui des 3 gorges, continue d’alimenter les polémiques en raison de deux obstacles majeurs majeurs : la mauvaise exploitation du combustible et la gestion des déchets radioactifs. Le géant Rosatom tente une approche nouvelle avec son réacteur VVER-S.
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Le VVER-S, une nouvelle réponse russe au double problème du nucléaire
L’Institut de Physique et d’Ingénierie de l’énergie A.I. Leypunsky en Russie a démarré des tests sur les propriétés neutroniques du réacteur VVER-S utilisant du combustible MOX (mixed oxide). Ces expériences se déroulent sur le site de test BFS-1.
Un réacteur qui produit son propre combustible
Le VVER-S, en développement par Rosatom, est un réacteur modéré et refroidi à l’eau d’une puissance de 600 MW.
Les réacteurs à eau pressurisée utilisent généralement de l’acide borique dissous dans l’eau pour réguler la réaction. Mais le VVER-S emploie une approche différente : le contrôle spectral. Plutôt que d’absorber les neutrons avec du bore, il ajuste le rapport entre l’eau et l’uranium. L’uranium-238 capte ainsi les neutrons excédentaires, produisant du plutonium utilisable comme combustible.
Ce système permet de réduire la dépendance au combustible frais et d’optimiser l’utilisation de chaque gramme de matière fissile.
Le combustible MOX : une solution au gaspillage
Le combustible MOX (ou MOx) est un combustible nucléaire constitué de 8,5 % de plutonium et 91,5 % d’uranium appauvri. Le terme MOX est l’abréviation de « mélange d’oxydes » (ou mixed oxides en anglais) car le combustible MOX contient plus exactement du dioxyde de plutonium (PuO2) et du dioxyde d’uranium appauvri (UO2). En l’utilisant, le réacteur valorise des déchets qui seraient autrement stockés sans autre usage.
Rosatom estime que si le VVER-S fonctionne avec une charge complète de MOX, l’utilisation d’uranium naturel pourrait être réduite de moitié. Sur toute sa durée de vie, cela représenterait une économie équivalente au coût initial du réacteur.
Un projet inscrit dans une stratégie à long terme
Le développement du VVER-S fait partie de la stratégie Nucléaire 2050 de la Russie, qui vise à atteindre cinq objectifs :
- Diminuer la consommation d’uranium naturel
- Mettre en place un cycle du combustible fermé (recyclage optimal des matières fissiles)
- Assurer une flexibilité de production pour s’adapter aux fluctuations de la demande
- Réduire les coûts de construction des nouveaux réacteurs
- Minimiser la production de déchets radioactifs
Les deux premiers exemplaires du VVER-S doivent être construits sur le site Kola 2, dans la région de Mourmansk. Le chantier devrait débuter en 2028 pour une mise en service vers 2035.
Le marché mondial du combustible nucléaire pèse 9,2 milliards d’euros par an
Le marché mondial du combustible nucléaire est estimé à environ 10 milliards de dolalrs (9,2 milliards d’euros) par an, en lien avec la consommation d’environ 62 000 tonnes d’uranium naturel par an pour alimenter les réacteurs nucléaires. Ce marché est porté par plus de 410 réacteurs opérationnels dans le monde, produisant près de 2 900 TWh d’électricité en 2025. Les principaux acteurs incluent Framatome, Westinghouse, TVEL et Orano, qui innovent dans des combustibles avancés comme les ATF (Accident Tolerant Fuels). La demande croît particulièrement en Asie, où des pays comme la Chine investissent massivement dans de nouvelles capacités nucléaires. Le marché devrait continuer à se développer avec l’essor des petits réacteurs modulaires (SMR).
Framatome, le géant français qui travaille également sur de nouveaux combustibles
Le français Framatome développe également des combustibles nucléaires innovants pour améliorer la performance et la sécurité des centrales. En 2023, l’entreprise a créé un combustible monolithique U-Mo à haute densité pour le réacteur de recherche FRM II. Framatome travaille également sur des combustibles à haut taux de combustion pour les réacteurs à eau pressurisée, optimisant les cycles de 18 à 24 mois. L’entreprise participe au programme Accident Tolerant Fuel (ATF) pour développer des combustibles plus résistants aux accidents, visant une commercialisation d’ici 2025. En mars 2025, Framatome a fait valider son dernier combustible pour le parc américain, lui promettant l’accès au premier marché mondial.
Les projets de réacteurs nucléaires de 4e génération dans le monde
Aussi moderne soit-il, le réacteur VVER-S reste un réacteur de génération III+ et il pourrait rapidement devenir obsolète face à l’émergence de la nouvelle génération.
Les réacteurs nucléaires de génération IV sont des systèmes avancés conçus pour améliorer la sûreté, réduire les déchets, optimiser l’utilisation des ressources naturelles et diminuer les risques de prolifération.
Ces réacteurs incluent six concepts principaux :
- réacteur à très haute température (VHTR pour Very High Temperature Reactor) ;
- réacteur à eau supercritique (RESC, ou SCWR pour SuperCritical Water Reactor) ;
- réacteur à sels fondus (RSF, ou MSR pour Molten Salt Reactor ) ;
- réacteur à neutrons rapides à caloporteur gaz (en) (RNR-gaz, ou GFR pour Gas-cooled Fast Reactor ) ;
- réacteur à neutrons rapides à caloporteur plomb (RNR-Pb, ou LFR pour Lead-cooled Fast Reactor) ;
- réacteur à neutrons rapides à caloporteur sodium (RNR-Na, ou SFR pour Sodium-cooled Fast Reactor).
Parmi les projets en cours, la Chine a mis en service en 2023 une centrale refroidie au gaz, tandis que la Russie exploite déjà des prototypes industriels comme le BN-800. En France, le projet Astrid a été abandonné (puis finalement relancé) et des recherches sur les RNR continuent (notamment avec acteurs Newcleo). Les États-Unis et le Canada investissent également dans la recherche sur de petits réacteurs modulaires (SMR), notamment dans le cas des premiers, pour alimenter leurs monstrueux centre de données.
Ces systèmes pourraient être déployés à grande échelle entre 2030 et 2050.
Source : Rosatom
Bonjour
Bel article sur le nucléaire, sur les projets en cours et futurs .
Avec l’arrivée de Dominique Voynet dans un comité sur le nucléaire et sa sécurité nous promet un échec total