Et si cette fois c’était la bonne technologie pour faire voler nos avions proprement ?

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Des piles à combustible au sodium pour faire voler nos avions ? Le pari fou des chercheurs du MIT.

Des batteries qui peinent à suivre, des avions toujours plus lourds… Et si la clé se trouvait dans un matériau aussi commun que le sel de table ? Au MIT, une équipe d’ingénieurs et de chercheurs a mis au point un nouveau type de pile à combustible au sodium, une innovation qui pourrait bien bouleverser l’aviation électrique et, plus largement, les transports à longue distance. Découvrons ensemble cette petite révolution scientifique.

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La question taraude les ingénieurs depuis des années : comment stocker assez d’énergie pour faire décoller un avion électrique sans l’alourdir à l’excès ? Les batteries au lithium-ion plafonnent à 300 watt-heures par kilogramme. Insuffisant pour envisager un vol régional, encore moins pour traverser un océan. La pile à hydrogène est un concept intéressant, notamment étudié par la France mais d’autres pistes peuvent être étudiées.

Les chercheurs du MIT, eux, veulent croire en un nouveau venu : une pile à combustible qui utilise du sodium fondu comme carburant. Le sodium, très répandu et peu coûteux, offre des performances énergétiques hors norme. Selon leurs premiers résultats, la densité énergétique atteint 1 500 watt-heures par kilogramme à l’échelle d’une cellule expérimentale. Une avancée qui pourrait permettre aux avions de franchir le seuil des 1 000 watt-heures par kilogramme, un niveau jugé indispensable pour l’aviation régionale électrique.

Comment ça fonctionne ?

La recette de cette pile à combustible est à la fois simple et terriblement ingénieuse. Un côté de la cellule contient du sodium liquide, chauffé à 98 °C pour le maintenir fondu. L’autre côté n’est rien d’autre que de l’air ambiant, qui apporte l’oxygène nécessaire à la réaction.

Entre les deux, une céramique conductrice d’ions sodium fait office de membrane. Les ions sodium migrent au travers de cette membrane et réagissent avec l’oxygène de l’air dans un électrode poreux. Résultat : une réaction chimique qui libère de l’électricité tout en consommant progressivement le sodium.

Le concept a été testé sous deux formes : une cellule verticale en forme de H et une cellule horizontale, avec un bac de sodium fondu et un électrode poreux au fond. Dans les deux cas, la réaction se déroule à mesure que l’air humide entre en contact avec le sodium fondu.

Une performance qui change la donne

Les mesures réalisées sont particulièrement impressionnantes : plus de trois fois la densité énergétique des batteries classiques. Cette différence ouvre des perspectives non seulement pour l’aviation, mais aussi pour les transports maritimes et ferroviaires.

En pratique, les chercheurs imaginent des packs de piles à combustible insérés comme des plateaux de cantine dans un moteur. À mesure que le sodium est consommé, il est remplacé par de nouvelles cartouches, un peu comme un avion qui refait le plein de kérosène. Mais ici, pas de CO₂ à l’échappement : la réaction finale produit de l’oxyde de sodium, qui absorbe le dioxyde de carbone atmosphérique pour former du bicarbonate de sodium, autrement dit de la simple poudre à lever.

Et si ce bicarbonate finit dans les océans ? Il contribuerait même à réduire leur acidité. Une forme inattendue de dépollution gratuite, puisque le bicarbonate est un sous-produit naturel de la pile.

Des obstacles, mais des solutions à portée de main

Bien sûr, le sodium fondu est hautement réactif et doit être soigneusement contenu pour éviter toute combustion accidentelle. Mais le concept même de pile à combustible (qui sépare les réactifs) limite les risques par rapport à une batterie conventionnelle. La membrane céramique isole le sodium liquide de l’air, réduisant les risques d’emballement.

Quant à la production de sodium métallique, elle n’est pas un obstacle. Il fut un temps où les États-Unis en fabriquaient 200 000 tonnes par an, pour les additifs plombés des carburants. Une telle échelle de production pourrait être relancée, avec des filières de recyclage des cartouches de sodium.

La disponibilité du sodium est aussi un atout : ce métal provient du sel de mer, une ressource quasi inépuisable et peu coûteuse.

Une équipe et un calendrier ambitieux

Derrière ce projet se trouve un quatuor de chercheurs : Karen Sugano, Sunil Mair, Saahir Ganti-Agrawal et le professeur Yet-Ming Chiang, un habitué des innovations électrochimiques. Leur entreprise naissante, Propel Aero, hébergée par l’incubateur du MIT, ambitionne de développer un démonstrateur d’ici un an : une cellule de la taille d’une brique, capable d’alimenter un drone agricole.

Dans cette aventure, l’humidité de l’air s’est révélée un paramètre essentiel. Karen Sugano a montré qu’avec de l’air sec, les sous-produits de la réaction forment un solide qui bouche le système. Avec un air humide, en revanche, les sous-produits restent liquides et sont facilement emportés, garantissant une performance optimale.

Le projet s’appuie sur une multitude de compétences : l’électrochimie, les matériaux céramiques, mais aussi les recherches sur les batteries sodium-air menées ces trente dernières années. Un mélange audacieux, qui donne à cette pile une longueur d’avance sur les tentatives passées.

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La promesse d’un ciel plus propre

Si la pile à combustible au sodium parvient à s’imposer, l’impact pourrait être considérable. Non seulement pour l’aviation régionale, 80 % des vols domestiques, mais aussi pour la planète.

Avec des émissions quasi nulles de CO₂, une production à base de sel et un recyclage possible du bicarbonate de sodium, ce système coche toutes les cases de l’énergie propre. Il reste à franchir l’étape de la démonstration à grande échelle mais à entendre les chercheurs, cette étape n’est plus qu’une question de temps.

Et qui sait, peut-être qu’un jour, votre prochain vol en avion électrique sera propulsé… par du sodium fondu.

Source :

Sodium-air fuel cell for high energy density and low-cost electric power

Sugano, Karen et al.

Joule, Volume 0, Issue 0, 101962

https://www.cell.com/joule/fulltext/S2542-4351(25)00143-6

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Guillaume AIGRON
Guillaume AIGRON
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