Le train sans conducteur s’invite à Hambourg grâce à Alstom.
La métropole allemande va numériser son réseau S-Bahn à grande vitesse. Alstom vient de décrocher un contrat de plus de 60 millions d’euros pour moderniser 82 rames du type BR 490. L’objectif : transformer ces trains classiques en véritables machines semi-autonomes grâce à l’ajout de deux technologies de pointe.
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Hambourg va utiliser le savoir-faire d’Alstom pour moderniser sa flotte de train du réseau S-Bahn
Le premier volet du projet concerne l’ETCS, acronyme barbare pour European Train Control System. Ce système standardisé au niveau européen remplace les signaux traditionnels au sol par une transmission d’informations en continu, directement dans la cabine.
Le second volet, l’ATO, pour Automatic Train Operation, permet aux trains d’avancer, freiner et s’arrêter automatiquement, tout en laissant à l’opérateur le soin d’ouvrir les portes et de gérer les imprévus (niveau d’automatisation GoA2).
C’est donc un pilotage hybride, entre humain et logiciel, qui sera mis en place. Comme une voiture en mode régulateur adaptatif, mais sur rails.
Un premier lot de cobayes pour test d’ici 2029
Les opérations débuteront par la transformation de quatre trains prototypes, qui seront équipés, testés, puis homologués d’ici 2029. Tout se passera dans l’usine Alstom de Hennigsdorf, au nord de Berlin. Ces quatre rames feront office de laboratoires roulants avant que la grande série ne commence.
Une fois validée, la technologie sera déployée sur les 78 autres trains, via une opération de rétrofit, c’est-à-dire une modernisation sans construction neuve. Cette mise à niveau en série sera confiée à la Deutsche Bahn, avec le soutien technique continu d’Alstom. Le but : uniformiser la flotte BR 490, avec une cohérence technique entre anciens et nouveaux modèles.
À noter que les 64 trains du deuxième lot BR 490, déjà commandés, seront quant à eux livrés prêts à l’emploi avec ETCS et ATO. Une flotte, deux approches, même destination : la digitalisation.
Un train qui pense, c’est un train qui consomme moins
L’un des intérêts majeurs de cette automatisation partielle est la réduction de la consommation d’énergie. En automatisant les accélérations, freinages et arrêts, le système ATO permet des économies substantielles, car les algorithmes gèrent les trajets de manière bien plus régulière que les conducteurs humains.
Autre effet secondaire appréciable : une meilleure régularité des horaires et des intervalles raccourcis entre deux trains. Résultat, plus de passagers transportés, sans avoir besoin d’ajouter de nouvelles rames. Un luxe dans les métropoles où les infrastructures sont déjà saturées.
Un projet à portée nationale
Ce n’est pas la première fois qu’Alstom déploie ses outils numériques en Allemagne. Dans le cadre du projet « Digital Node » de Stuttgart, la firme équipe déjà 215 trains S-Bahn et 118 trains régionaux avec les mêmes technologies.
Cette homogénéité permet non seulement des économies d’échelle, mais aussi une meilleure interopérabilité entre les régions. L’ETCS, étant une norme européenne, facilite la communication entre différents réseaux, tout en anticipant la fin programmée des systèmes nationaux comme le PZB ou le LZB.
En somme, la digitalisation ne se limite pas à une simple mise à jour technologique : elle réécrit l’architecture du réseau ferroviaire allemand.
Une boîte noire nommée Onvia Cab
Le cerveau embarqué de cette opération s’appelle Onvia Cab. C’est le module technique qui gère l’interaction entre le train, l’infrastructure et l’opérateur. Cette technologie est déjà installée dans près de 24 800 véhicules dans le monde et fonctionne sur plus de 13 300 kilomètres de voies.
Compatible avec la dernière norme TSI 2023, Onvia Cab peut être installé aussi bien sur des trains neufs que sur des modèles plus anciens, ce qui en fait un allié idéal pour les flottes hétérogènes. Il s’agit d’un système modulaire, qui communique avec les capteurs, la signalisation, et même les systèmes de surveillance à distance. Une sorte de chef d’orchestre numérique, invisible mais omniprésent.
Objectif : une mobilité urbaine plus verte et plus dense
Derrière ce projet technique se cache une ambition bien plus large. En automatisant et en numérisant le transport ferroviaire urbain, Hambourg vise à accroître la capacité de son réseau sans investir dans de nouvelles lignes. C’est une stratégie qui permet à la ville de répondre à l’augmentation du trafic tout en respectant ses engagements climatiques.
Jan Schröder, président de S-Bahn Hamburg, a déclaré : “Avec la digitalisation complète du S-Bahn de Hambourg, nous établissons de nouveaux standards pour l’avenir du rail. Je suis heureux que nous ayons pu nous choisir un partenaire aussi solide qu’Alstom pour la modernisation des 82 derniers véhicules. La numérisation complète de la flotte est une étape importante pour l’augmentation de la capacité, l’amélioration de la qualité et l’augmentation de l’efficacité des opérations de la S-Bahn. Je remercie tout particulièrement la ville de Hambourg et l’Autorité pour la transition des transports et de la mobilité pour leur engagement fort en faveur de S-Bahn Hamburg”.
Même si le train sans conducteur intégral (GoA4) reste encore lointain, ce GoA2 constitue une étape décisive vers un futur ferroviaire plus fluide, plus économe… et plus intelligent.
Le réseau ferroviaire allemand, un marché de prestige à 150 milliards d’euros pour Alstom
Le réseau ferroviaire allemand est l’un des plus vieux et plus denses au monde, avec environ 34 000 kilomètres de voies. La Deutsche Bahn, principal exploitant, gère 33 400 kilomètres de ce réseau. Cependant, le réseau souffre de problèmes de ponctualité et d’infrastructure vieillissante, nécessitant des investissements massifs. La DB a investi un record de 17 milliards d’euros en 2023 pour améliorer ses infrastructures. À long terme, elle estime qu’il faudrait environ 150 milliards d’euros pour moderniser complètement le réseau. Les efforts incluent également la numérisation, avec un financement fédéral de 8 milliards d’euros prévu jusqu’en 2029.
Source : Alstom