La France commence une course contre la montre pour égaler les performances américaines dans la fusion nucléaire par confinement inertiel

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Les lasers américains établissent un nouveau record d’allumage pour la fusion nucléaire.

Dans un laboratoire californien ultrasécurisé, un minuscule grain d’hydrogène vient d’exploser… pour la science. Grâce à 192 lasers synchronisés à la microseconde près, les chercheurs américains viennent de produire jusqu’à 8,6 mégajoules d’énergie à partir d’une fusion contrôlée. Une avancée spectaculaire, mais qui, pour l’instant, n’alimentera pas la moindre ampoule.

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Un record pour la postérité et des promesses pour la fusion nucléaire par confinement inertiel

Tout se passe à Livermore, au sein du National Ignition Facility (NIF), un site de recherche unique en son genre rattaché au Lawrence Livermore National Laboratory. Les scientifiques y travaillent d’arrache pied sur la fusion par confinement inertiel. Le principe est simple : bombarder une capsule de carburant nucléaire avec des faisceaux laser extrêmement puissants pour engendrer la réaction qui rend possible la fusion nucléaire.

La cible est un assemblage millimétrique : une goutte de deutérium et de tritium, deux isotopes de l’hydrogène, enfermée dans une coquille de diamant et logée dans un cylindre d’or, le hohlraum. En un éclair, 192 lasers déclenchent une onde de choc si puissante qu’elle compressent la capsule à une densité et une température comparables à celles du centre du Soleil.

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5 mégajoules, puis 8,6 : une montée en puissance fulgurante

Le NIF a réussi début 2025 une série d’expériences impressionnantes. En février, l’un des tirs a permis d’atteindre 5,2 mégajoules d’énergie produite à partir de 2,05 mégajoules de laser, soit un gain d’énergie net de plus du double. Mais le tir suivant a fait encore mieux : 8,6 mégajoules, selon des sources proches du projet.

Ces performances s’inscrivent dans une suite de succès depuis le premier allumage réussi en décembre 2022, où 3,15 mégajoules avaient été produits pour 2,05 mégajoules de laser.

Petit rappel utile : un mégajoule équivaut à l’énergie nécessaire pour faire bouillir environ 240 litres d’eau. Donc 8,6 mégajoules, c’est impressionnant… pour un laboratoire. Mais très insuffisant pour faire tourner un grille-pain pendant une minute.

Un record… mais un rendement global toujours négatif

Le NIF n’est pas une centrale. Il s’agit d’un démonstrateur scientifique conçu pour valider les principes physiques de la fusion. Certes, les expériences récentes montrent un gain net à l’échelle de la cible (plus d’énergie sort du noyau qu’on en injecte avec les lasers), mais le système global consomme bien plus.

Chaque tir demande environ 300 mégajoules pour alimenter les lasers. En clair : on dépense 300 pour en produire 8,6… À l’échelle industrielle, cela reste un gouffre énergétique. Et pourtant, les scientifiques sont enthousiastes : c’est la preuve que l’allumage est possible, reproductible, et améliorable.

Ce que fait fondamentalement la fusion inertielle

À la différence de la fusion magnétique, qui utilise des champs magnétiques pour confiner le plasma (comme dans le réacteur ITER en construction), la fusion inertielle mise sur la brutalité millimétrée.

Voici la séquence résumée :

  1. Un minuscule cylindre d’or renferme une bille de carburant.
  2. 192 lasers tirent en même temps et chauffent les parois internes du cylindre.
  3. Des rayons X sont émis, enveloppant le carburant.
  4. La coque extérieure explose vers l’extérieur… et écrase le cœur vers l’intérieur.
  5. La pression et la chaleur fusionnent les noyaux d’hydrogène… en hélium + énergie.

Un gain net est atteint quand l’énergie libérée dépasse celle des lasers, sans même compter l’électricité qu’il faut pour les allumer.

Un septième allumage pour une confirmation

Le 23 février 2025, le NIF a obtenu son septième allumage avec un rendement de 2,44. Cela signifie que l’énergie émise par la capsule était 2,44 fois supérieure à l’énergie des lasers atteignant la cible.

Le tir de 2,05 mégajoules a ainsi libéré 5,0 mégajoules, soit le deuxième meilleur tir enregistré à ce jour. Un huitième allumage, non encore confirmé officiellement, aurait produit les 8,6 MJ rapportés récemment.

Les chercheurs prévoient d’autres tirs dans les prochains mois, avec encore plus de puissance. L’objectif : démontrer que ce phénomène peut être reproduit à volonté, une condition essentielle avant de songer à l’industrialisation.

La France aussi mise sur le confinement inertiel pour atteindre la fusion nucléaire

Thalesa récemment annoncé vouloir tenter l’aventure de la fusion nucléaire avec le projet  GenF, dédié au développement d’un réacteur à fusion par confinement inertiel. Installée au Barp, en Gironde, GenF bénéficie d’un partenariat étroit avec le CEA, le CNRS, l’École polytechnique et la Région Nouvelle-Aquitaine, et pourra utiliser le Laser MégaJoule du CEA DAM, un outil unique en Europe capable de simuler les conditions extrêmes d’une explosion nucléaire et d’expérimenter la fusion inertielle à grande échelle. Thales met à disposition son expertise mondiale dans les lasers de haute puissance, déjà éprouvée sur d’autres installations de pointe, pour accélérer la mise au point du prototype. GenF ambitionne de réunir une trentaine de chercheurs d’ici 2027 et de présenter un premier démonstrateur industriel dans la décennie.

Le projet de Thales marque la volonté de la France de rester à la pointe de l’innovation énergétique et de la souveraineté technologique sur un marché mondial en pleine effervescence.

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Les chiffres-clés du programme NIF

Paramètre Valeur
Nombre de lasers utilisés 192
Énergie injectée par tir 2,05 MJ
Meilleure énergie produite 8,6 MJ
Énergie consommée par le système ≈ 300 MJ
Nombre d’”allumages” réussis 8 (dont 7 confirmés)
Diamètre de la chambre de tir 10 mètres
Gain record obtenu (février 2025) 2,44

 

Un dernier mot pour les curieux : 8,6 mégajoules, c’est environ 2,4 kilowattheures. Soit de quoi faire fonctionner un radiateur de 1 000 watts pendant deux heures et demie. Pas encore suffisant pour chauffer votre salon… mais assez pour réchauffer les espoirs de toute la communauté scientifique.

Et qui sait ? Si l’on parvient un jour à améliorer le rendement global et à réduire la taille du dispositif, la fusion laser pourrait bien devenir le cœur battant de notre avenir énergétique !

Sources :

  • https://lasers.llnl.gov/science/achieving-fusion-ignition
  • Communiqué de presse de Thales
  • CNRS

Image : Laser Mégajoule du CEA

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Guillaume AIGRON
Guillaume AIGRON
Très curieux et tourné vers l'économie, la science et les nouvelles technologies, (particulièrement ce qui touche à l'énergie et les entreprises françaises) je vous propose de de découvrir les dernières actualités autour de cette passion

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